Recette pour une journée réussie : se lever du pied gauche, n’ouvrir les yeux que dans la cuisine, se servir un café, avec deux tartines de beurre de cacahuète, déguster en toute tranquillité, et enfin se doucher à l’eau tiède voire froide. Voici mon matin type. J’avais exécuté la première partie de la recette avec brio, en grande partie grâce à Cox qui avait fait couler le café et qui avait mis devant moi les tartines et le beurre de cacahuète. Ce fut un petit-déjeuner fort agréable, et très amusant. Pour nous en tout cas, certainement moins pour d’autres… Il ne me restait donc plus que la douche.

Je me rendais dans la salle de bain, un boxer propre dans la poche de mon peignoir que j’avais enfilé en me levant afin de ne pas choquer les autres habitants dès le matin. Je repensai à la première douche collective de la veille. Premier jour, première soirée, première douche. Sincèrement je ne l’avais pas vraiment prévu, mais mes poils de bisounours m’avaient vraiment donné trop chaud. Et je ne pensais pas que tout le monde allait me suivre sous la douche ! Si c’était comme ça à chaque douche que je prenais, j’allais vite avoir des soupçons de complot… Mon gel douche dans la main, j’arrivai dans la salle de bain. Je déposai celui-ci dans la douche, posai mon boxer sur le rebord du lavabo et je m’apprêtai à faire glisser mon peignoir lorsque j’aperçus Alessandra dans le reflet du miroir. Les filles sont peu nombreuses dans la maison, j’ai comme l’intuition que La Voix nous réserve quelques surprises pour le prochain prime. J’avais fait un peu connaissance avec Alessandra, au bord de la piscine. Elle avait eu l’air d’adorer mes poils de bisounours elle, contrairement à moi. C’était visiblement pour elle l’heure de la douche aussi. Je la saluai et retirai finalement mon peignoir avant de me placer dans la douche. J’actionnai l’eau, restant à l’écart afin de tester la température, et constatant qu’elle était assez froide pour moi, je me plaçai enfin dessous. Il était presque midi, et la journée commençait plutôt bien.

Je crois que la première chose à remarquer sur les candidats de cette année, c’était qu’aucun ne semblait vraiment pudique ! Mis à part Cox qui avait été un peu réticente à l’idée de se doucher nue la veille, tout le monde semblait d’accord sur le fait qu’une douche se prend nu, et non pas en maillot de bain ou en sous-vêtements. Alessandra me rejoignit donc nue sous la douche. J’en profitai pour observer son corps, qui n’était vraiment pas déplaisant à regarder. Certes les filles n’étaient pas nombreuses, mais comme on dit ce n’est pas la quantité qui compte, mais la qualité ! La journée commençait vraiment bien.

Bien dormi Raphael ? J’avais toujours un peu tendance à oublier ce genre de questions matinales. C’est bien pour ça que je ne les posais presque jamais. Pourtant je n’étais pas de ceux qui n’aiment pas parler le matin. Une fois mon café servi, pour moi tout va bien, et je peux commencer une conversation sur les arbres en Amazonie ou sur la météo du week-end. Je dois avouer que certains sujets me gavent plus que d’autres, mais qu’importe, je trouve toujours le moyen de m’en amuser. Je répondis donc à Alessandra, tout en me servant de mon gel douche Fresh, pour nous les hommes.

Oui très bien, il parait que j’ai parlé mais tant pis pour les autres tant que moi je dors bien. Et toi, le bisounours ne t’a pas trop manqué ?

C’était Cox qui m’avait dit que j’avais parlé cette nuit, pendant que l’on prenait notre petit-déjeuner dans la cuisine. D’ailleurs, elle devait normalement m’y attendre, et j’avais une mission à accomplir… Je me frottai énergiquement, profitant de la fraicheur de l’eau et du gel douche, attendant la réponse de cette charmante demoiselle qui prenait sa douche avec moi. Y a pas à dire, on est quand même vachement bien dans la maison des secrets.

Je ne m’en étais pas encore rendu compte, mais Alessandra semblait elle aussi préférer l’eau froide pour se doucher le matin. C’était plutôt rare, et j’étais surpris qu’elle ne hurle pas lorsque l’eau commença à lui couler dessus. Tant mieux, car même si je n’avais pas besoin de silence le matin, les cris d’une femme n’étaient pas ce que je préférais. Du moins, pas ce genre de cris. Je me remémorai le défi que m’avait lancé Cox avant que je vienne dans la salle de bain. Si je voulais avoir une chance de la retrouver dans la cuisine, il ne fallait pas que je tarde trop. Cela faisait en gros cinq bonnes minutes, peut-être sept, que je l’avais laissé et que j’étais entré dans la salle de bain. Je jetai un œil à mon peignoir que j’avais laissé par terre avant d’entrer dans la douche.

La conversation était maintenant bien entamée avec Alessandra, j’allais pouvoir agir. Oh non non, il ne m'a pas manqué. J'ai chahuté une bonne partie de la nuit, dans la piscine avec Carwyn. J'espère d'ailleurs qu'on a pas fait trop trop de bruit. Carwyn… Ah oui c’était ce mec qui était resté coincé dans le pouf. Je ne lui avais pas encore vraiment parlé. Ça n’allait probablement pas tarder. Alessandra me demandait à moi si je l’avais entendu ? Avec mon sommeil de plomb, ça ne risque pas. Déjà que je n’entends pas les bruits quand ils sont dans la même pièce, alors là dans la piscine, aucune chance.

Ah non j’ai rien entendu, je dors un peu trop profondément. On peut me faire n’importe quoi la nuit, je me réveille pas.

C’est dit. On ne sait jamais, si un jour elle a envie de me faire quelque chose pendant que je dors… Oh ça va je rigole ! Que vous êtes coincés. Bon, c’est parti.

Carwyn, c’est celui à l’accent bizarre non ? Il m’inspire pas vraiment ce mec là. D’ailleurs toi j’ai l’impression que tu es un peu à parler à tout le monde comme ça et faire comme si tu les adorais tous.

Je me rinçais les cheveux, et passai mes mains sur les yeux afin de regarder la réaction d’Alessandra.

Oups ? Je me doutais qu’Aless n’allait pas vraiment apprécier que je lui dise comme ça sans véritable raison que je la trouvais hypocrite. En plus c’était faux, je ne la trouvais pas hypocrite. Pas pour le moment du moins, puisque je sais que tout le monde est hypocrite, ou presque. La franchise se fait tellement rare de nos jours… Au moins j’avais planté le décor, après l’image du bisounours, je montrais enfin le vrai Raphael, celui au franc-parler. Bon certes là c’était un jeu pour moi, et j’avoue que la réaction d’Alessandra m’amusait, mais je préférais ne pas le montrer, au risque de me faire détester définitivement.

J’avais arrêté l’eau afin d’entendre sa réponse, mais celle-ci ne vint pas tout de suite. Alessandra avait sans doute préférer attendre quelques instants avant de me faire part de la colère que j’avais suscité chez elle. Elle avait terminé de prendre sa douche, avait enfilé son peignoir et alors seulement elle se tourna vers moi et me dit tout ce qu’elle avait à me dire. Je retins un sourire lorsqu’elle m’insulta de « vrai salaud ». Waouh, carrément, j’avais touché le jackpot ! Elle avait dit tout ça sur un ton de conversation plutôt normale, on aurait pu croire qu’elle me racontait simplement sa vie. Et pourtant, la réalité était toute autre. J’allais avoir du mal à me faire pardonner, je le sentais bien. Mais au moins, j’avais réussi mon premier défi, et j’étais plutôt fier de moi.

Elle enfila ses sous-vêtements et se dirigea vers la sortie. Je ne pouvais quand même pas terminer cette conversation comme ça, il fallait que je fasse quelque chose. J’attrapai alors mon peignoir qui trainait par terre, faisant tinter le porte-clés qui me rappela que je devais rejoindre Cox dans la cuisine. J’enfilai donc mon peignoir et attrapai le bras d’Alessandra.

Non mais excuse-moi, je suis un peu trop franc parfois. C’est pas vraiment de l’hypocrisie, mais je sais pas, je trouve que tu vis un peu dans un monde de bisounours justement. Mais tu viens de me prouver le contraire. J’espère que tu accepteras de reprendre une douche avec moi un de ces jours. Je crois qu’on pourrait vraiment bien s’entendre toi et moi.

Je lui souris timidement. Je lui aurais bien lancé un « Tu veux un câlin ? » mais sans le costume, j’avais peur de me prendre une baffe. Je me contentai donc de la regarder dans les yeux, tentant de décrypter ses pensées, qui devaient probablement être pleine d’insultes en tout genre à mon égard. Et oui, ce jeu de « cap ou pas cap » nous faisait souvent passer pour des méchants. Et le pire, c’est que j’aime ça.

J’avais au moins réussi à la retenir, je pouvais déjà considérer que j’avais amélioré la situation. Évidemment, c’est sans compter sur la suite de la scène… Oui, j’ai bien dit la scène, car j’avais vraiment l’impression d’être dans une pièce de théâtre. J’avais un peu de mal à définir mon rôle, mais c’était vraiment ça. Une comédie dramatique. D’abord l’ambiance conviviale sous la douche, une discussion s’engage entre deux personnes qui avaient sympathisé auparavant, tout se passe bien, l’eau est à la bonne température pour les deux jeunes gens, oui tout va bien. Jusqu’à ce que je provoque la crise.

Alessandra m’avait écouté tout en me regardant, et je sentais dans son regard qu’elle avait des milliers de choses à me dire. Apparemment, le « monde des bisounours » fut l’élément déclencheur. Je l’écoutai alors attentivement. Elle se livrait à moi, sans retenue, voulant me prouver qu’elle n’était pas celle que je croyais. Mais elle se trompait, je ne l’avais pas jugé, et elle n’avait pas besoin de se justifier. Mais qu’importe, elle me raconta son histoire, et moi je ne pouvais qu’écouter. Je constatai alors qu’elle n’avait pas un passé aussi radieux que le mien, comme beaucoup de personnes d’ailleurs. Il faut dire que tout a été tellement simple pour moi. Je ne m’en cache pas, j’ai beaucoup de chance, et j’ai toujours dit que ma vie était vraiment belle. Pour Alessandra, ça n’avait visiblement pas toujours été le cas. J’écoutai son récit tout en l’observant, et au fur et à mesure, je sentais que ses défenses s’effondraient. Elle finit par se laisser glisser contre le mur, ne pouvant arrêter ses larmes.

Et maintenant, qu’est ce que je suis censé faire moi ? Je ne m’attendais pas vraiment à ça, pas maintenant, pas déjà, pas tout de suite, pas ici, pas comme ça. Mais une chose était sure, je ne pouvais pas la laisser dans cet état. Après tout, c’était un peu de ma faute. Je m’agenouillai devant elle, posant mes mains sur ses épaules, et de ma voix la plus douce

Je suis désolé pour tout ça.

Je lui pressai légèrement l’épaule, geste inutile pour tenter de lui redonner un peu de force. Puis me relevai, et m’apprêtai à sortir de la salle de bain. Je reviens. J’allai chercher une boite de mouchoirs et un verre d’eau. Il faisait toujours ça dans les films. Je ne vois pas ce qu’un verre d’eau a de réconfortant, mais tant pis pour une fois je ferais comme tout le monde.

Je revenais dans la salle de bain, sentant l’absence du porte-clés dans ma poche, la boite de mouchoirs coincée sous le bras et un verre d’eau dans la main. Je fus d’abord un peu surpris de ne pas retrouver Alessandra là où je l’avais laissé, contre le mur, recroquevillée. Mais j’entendais l’eau coulée et tournai alors la tête vers la douche. Je la vis assise sur le sol, sous l’eau, en sous-vêtements. Dommage, elle venait juste de les mettre…

Je déposai le verre sur le bord d’un des lavabos et retirai à mon tour mon peignoir. Je me retrouvai (encore) en boxer, je crois que je ne serais pas souvent habillé devant les caméras. J’allai passer pour le nudiste de la saison, tant pis. Entre nudiste et bisounours, je donnais matière à critiquer. J’entrai alors à mon tour sous la douche, boite de mouchoirs à la main, et m’installai aux cotés d’Alessandra. Je lui tendis les mouchoirs, qui prenaient l’eau, évidemment, ce qui donnait un certain comique à la scène. Le bruit de l’eau qui coule était apaisant. Je préférais ne pas parler, laissant Aless reprendre ses esprits et profiter de l’eau qui était à une température parfaite. Je me remémorais l’histoire qu’elle m’avait racontée. Je ne savais pas si elle avait l’intention de m’en dire plus, mais si elle avait besoin de se confier, je me promis d’être là. J’étais attentionné de nature, même quand j’étais à l’origine du malaise, ce qui arrivait souvent avec mon humour noir.

Je restai à ses côtés, sans prononcer un mot. J’avais bien pensé à lui dire un truc du genre « tu sais, il faut savoir laisser le passé là où il est. » mais premièrement je la connaissais à peine alors je ne pouvais pas me permettre ce genre de choses, bien que je l’aurais fait si je ne l’avais pas déjà vexé juste avant, et deuxièmement c’était une phrase tellement bateau qu’elle ne signifiait plus rien. Tant pis, je laissai l’eau faire son travail. J’espérais simplement qu’elle sente dans ma présence que je ne la jugeais pas sur son passé, et que j’étais prêt à l’écouter encore s’il le fallait.

Finalement, tout est bien qui finit bien. J’avais réussi mon gage, j’avais lancé le mien à Cox, et Alessandra semblait allait mieux. Elle était même désolée de m’avoir insulté de salaud. Je n’aurais pas pu demander plus. Si elle savait le nombre de fois où on m’avait insulté, elle n’en serait peut-être pas désolée… Mais je ne vais pas me plaindre. Je l’aimais bien cette fille, et je n’avais pas l’intention d’en faire une ennemie, au contraire.

J’étais vraiment content de ce premier défi, et de cette petite douche avec Alessandra. Elle n’avait pas été aussi calme qu’elle devait l’être pour une journée parfaite mais qu’importe, je m’étais quand même bien amusé, et j’étais presque pardonné. J’espérais juste que Cox ne me lancerait plus de défi en rapport avec Alessandra… Il y avait tellement peu de filles dans la maison, ça m’embêtait de m’engueuler avec elle. Même si je m’amusais bien avec les mecs aussi, c’est vrai. Mais quand même ! Alors Cox, prend garde à toi ! Je me demandais d’ailleurs où elle en était avec son défi. Il fallait que j’aille faire un tour dans la maison.

J’embrassai Aless sur la joue avant de me relever et de lui tendre la main.

Tu devrais aller t’habiller, et moi aussi d’ailleurs. T’as l’air d’apprécier l’eau froide comme moi, mais il ne faut pas abuser des bonnes choses tu sais. Ah et au fait, ne sois pas désolé pour le « salaud », je le mérite.

Je souris. Je ne disais pas ça sur le ton du mal-aimé, mais je sais ce que je suis et ce que je fais, et parfois ce terme me correspond bien, il faut le dire. A manier avec modération bien sur.

Alessandra attrapa ma main et se releva. C’était pour moi le signe définitif qu’elle ne m’en voulait plus trop. C’était une bonne chose. Elle m’embrassa sur la joue, ce qui confirma ma pensée. Je la regardais se diriger vers la porte de la salle de bain. Je la retrouverais surement plus tard dans la journée, et qui sait, peut-être rirons-nous de cet épisode riche en émotions.

Je pouvais désormais me concentrer sur le défi de Cox. Elle devait être à la recherche de Carwyn. J’avais bien l’intention de l’espionner, histoire d’être sûr qu’elle n’avait pas triché. J’étais persuadé qu’elle avait fait la même chose, alors je n’allais pas m’en priver. Je la retrouverais dans la cuisine, comme si de rien n’était. J’enfilai donc mon peignoir sur mon boxer trempé, et quittai la salle de bain.



RP TERMINÉ