Jeu de rôle basé sur l'émission de télé-réalité « Secret Story »
 
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 même si je sais -FRED

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Ana
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MessageSujet: même si je sais -FRED   même si je sais -FRED Icon_minitimeMer 24 Juil - 17:40



    FRED & ANA – tout s’efface.



J’avais besoin de ne plus me sentir observer pendant quelques instants. Aujourd’hui, j’avais besoin de ça. Juste aujourd’hui. Je sais que c’est stupide, faire Secret Story si on ne veut pas être observé. Mais j’en avais besoin, juste maintenant, juste un peu. Je n’étais pas triste, je n’étais pas mélancolique, ou nostalgique, je n’étais pas énervée. J’avais juste envie d’être là. Je sais que ce n’était surement pas le meilleur endroit, mais j’en avais assez de me réfugier dans le confessionnal. J’avais peur que ça devienne une habitude, et ce n’était pas une habitude que je voulais prendre. Alors je m’étais installée dans les toilettes, assise par terre, dos contre la porte, espérant que personne n’aurait besoin d’y venir pendant un petit moment. Mais nous étions seize désormais dans cette maison, je me doutais que quelqu’un allait venir frapper bientôt, trop tôt à mon goût.

Je portais mon médaillon autour du cou aujourd’hui. Je ne l’avais pas encore mis depuis le début de l’aventure. J’avais besoin de le sentir avec moi, après tout ce qu’il se passait ici. Après les rencontres. Après la salle de bain, après la réunification. Après tout ça. Je contemplais la photo qui s’y trouvait, l’esprit vide. Pour une fois, ce n’est pas au passé que je pensais en regardant cette photo, mais au présent. Je pensais à ce que je faisais là. Au pourquoi je me sentais obligée de venir m’enfermer ici, de me mettre à l’écart. Parce que ce n’était pas mon monde. Parce que je n’avais plus mes habitudes, et sans mes habitudes je suis perdue. Je n’avais pas encore pris d’habitudes dans cette maison, voilà pourquoi je sentais le besoin de venir m’enfermer ici. Ou peut-être que… Peut-être que j’en avais besoin parce qu’elle me manque. Mais ce elle n’était pas celui qu’il devrait être. Ce n’était pas elle, mais elle. Et je m’en voulais.

Je sais, je sais. Et soudain, comme je l’avais prévu, quelqu’un essaya d’ouvrir la porte. C’était tellement stupide de ma part d’espérer pouvoir rester ici librement. Maintenant il fallait que je sorte, parce que je ne pouvais pas priver les autres de cette partie de la maison, parce que c’était petit mais important. Il fallait que j’ouvre la porte et que je sorte. Mais il me restait encore quelques secondes. Tant que la personne derrière la porte ne faisait pas entendre sa voix, je pouvais encore rester assise. Quelques secondes. Je sentais le « c’est qui ? » ou « t’en as pour longtemps » arriver. Mais il me restait quelques secondes. Les yeux rivés sur la photo, j’attendais.    
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Sweety Dreamy

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MessageSujet: Re: même si je sais -FRED   même si je sais -FRED Icon_minitimeMer 24 Juil - 21:43






Tu restes là et rien ne passe...

Fred’. Ana.


Les heures s’enchaînaient. Le temps était rythmé par quelques discussions avec les autres. Le reste du temps, je le passais à attendre. A attendre que le temps passe. Mes émotions changeaient du tout au tout en quelques instants ici. C’était comme si tout était décuplé. Je ressentais des choses que je ne ressentais pas aussi rapidement d’habitude. Le rire, les larmes. Les joies, la peur. Et ça. Ça ne passait pas. J’avais beau me dire que ça passerait, mais ça ne passait pas. C’était toujours là, ancré dans ma mémoire. Si pour elle, cela n’avait rien signifié, ce n’était pas la même chose pour moi. Pour moi, cela avait compté. C’était là, et je ne pouvais pas l’effacer. J’avais voulu oublier. J’avais voulu ne pas y penser. Ne plus y penser. J’avais essayé de me changer les idées. En faisant un gâteau. En participant à la soirée. En discutant avec des gens, notamment avec John-E. Mais ça restait là, prêt à me sauter dessus à la moindre occasion. Et ça ressortait. Et je ne le supportais plus. Je retournais la scène dans ma tête, je cherchais à comprendre, à analyser. A me comprendre. A nous comprendre. Mais je ne comprenais rien. Sascha aurait bien ri si je lui avais raconté cela. Pourquoi est-ce que je cherchais toujours à compliquer ce qui peut être si simple ? Et puis pourquoi m'avoir rappelé? Pourquoi revenir me chercher? Pour te voir rire, te voir pleurer sans moi...Je cherchais des points de comparaison dans mon passé, mais je n’en trouvais pas. Je devais me rendre à l’évidence, c’était nouveau.

Et j’avais peur.

Peur de ça, peur de ce qui s’était passé, peur de moi et peur d’elle. J’avais peur de la croiser, j’avais peur de ce que nous nous dirions. Que pouvions-nous nous dire après ce qui s’était passé ? Est-ce qu’on devait faire comme si cela n’avait pas eu lieu. Alors que ça avait eu lieu. Pardonne-moi. Je ne pouvais pas. Je n’y arrivais pas. Comment pardonner ce qu’on ignore ?

Je lisais comme une folle. Les mots passaient sous mes yeux, je les regardais défiler sans vraiment les lire. Je les regardais filer dans mon livre et je tournais les pages. Mais je ne comprenais rien à ce que je lisais. Et je ne voulais pas lire ce livre. Pas ce type de livres maintenant. Et cette fille qui me fixe dans la chambre. Je sens son regard depuis dix minutes et je me rends seulement compte maintenant que je tourne les pages à une telle vitesse que j’ai attiré l’attention. Je ne lisais plus depuis longtemps. Je la regarde gênée. Je referme le livre, avant de me lever, glissant un rapide mot d’excuse, murmurant que je dois aller aux toilettes. Mes pas me guident hors de la chambre, j’ai toujours mon livre en main. Je ne sais pas ce que je vais faire maintenant. Je n’ai pas envie d’aller aux toilettes, c’était l’excuse facile. Mais maintenant que j’ai dit cela… mes pas m’y mènent. J’allais y lire. Peut-être alors que cela sortirait. Et puis je ne risquais pas de la croiser. Ce serait le plus simple. Oui. Fuir maintenant, ne pas assumer demain.

Ma main se pose sur la poignée de la porte, je cherche à l’enclencher, elle se bloque. Il y a déjà quelqu’un. Je ne peux pas y aller. Où aller ? Mécaniquement j’appuie sur la clenche une seconde fois. Une troisième. Je la lâche enfin. Je m’éloigne de quelques pas.

J’aimerai faire pipi.

Les mots sont sortis tous seuls, d’une voix enfantine. Je ne sais pas si c'est vrai, mais les mots me semblent justes. Je m'agrippe à mon livre, attendant patiemment que l'occupant sorte et me laisse entrer.



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MessageSujet: Re: même si je sais -FRED   même si je sais -FRED Icon_minitimeMer 24 Juil - 23:24


Juste quelques secondes. Et la voix se fit entendre. Quelque chose en moi se réveilla, sans que je ne sache vraiment de quoi il s’agissait. Une personne attendait derrière la porte, une personne qui avait besoin d’utiliser les toilettes pour leur véritable usage. Je m’y étais préparée, je savais que ce moment ne durerait pas. J’aurais peut-être dû m’installer dans la salle csa. Mais oui j’aurais dû. Si toutefois elle n’est pas occupée… Il est encore temps. Je n’ai qu’à sortir des toilettes, laisser la place à cette personne qui aimerait faire pipi, et aller dans la salle csa. Seule. Même si au fond je n’étais pas vraiment sûre de vouloir être seule. Mais il y avait tellement de monde dans cette maison, je ne savais plus vers qui aller. Ne serait-ce que pour discuter, je ne savais pas qui « choisir ». Même si mon esprit me criait qu’il n’y avait qu’une personne vers qui j’avais vraiment envie d’aller. Je le faisais taire sans pitié. Je ne voulais pas repenser à ça. Je me levai calmement et déverrouillai la porte.

Attention je vais ouvrir.

Et je poussai la porte. Pour me retrouver face à… elle.

Cette voix. Sa voix. Il fallait que ce soit elle, évidemment. Ca aurait pu être n’importe qui d’autre, mais non, il fallait que ce soit elle. Comment ai-je fait pour ne pas la reconnaître ? Je crois que mon inconscient l’avait reconnu, j’ai seulement ignoré ce qu’il me disait. Et maintenant je suis là, face à elle, face à Fred, la bouche entrouverte. Elle est là, son livre dans la main, et je bloque mon regard sur ce détail. J’en oublie de respirer, de cligner des yeux. On ne s’est pas retrouvée seule depuis… Depuis ça. Et clairement, je n’avais rien effacé. Parce que là devant elle, c’est comme si je me retrouvais de nouveau dans la salle de bain, sans savoir quoi dire, sans savoir quoi faire. J’avais beau avoir repoussé le moment d’y penser, d’y réfléchir, tout était resté. Rien n’avait disparu. Je devais faire en sorte que ça ne recommence pas. Alors que j’en crevais d’envie. Ce qu’il s’est passé était tellement hors du temps, hors du commun. Le genre de choses qu’on ne vit qu’une fois dans sa vie. Non en fait, il n’y a pas de « ce genre de choses », parce que c’était unique. Il n’y a que ce moment. Aucun autre n’y a ressemblé, aucun autre n’y ressemblera un jour. Les secondes défilent, et elle est face à moi.

Je suis bloquée. Vraiment, littéralement. Je suis figée. Mon regard reste bloqué sur le livre, parce que j’ai peur de la regarder dans les yeux. Mais cette fois je n’hallucine pas. Je sais que c’est elle en face de moi. Je ne vois pas autre chose. C’est elle que je vois. Et je ne sais pas quoi faire. Je pourrais faire ce que tout le monde aurait fait. Lui sourire, lui dire « la place est libre ». Et m’en aller. Voilà ce qu’il devrait se passer. Si seulement elle n’était pas elle, si je n’étais pas moi. Mais c’est elle, et c’est moi. On pourrait reprendre depuis le début. Avoir une conversation, je peux lui demander ce qu’elle fait dans la vie, même si je le sais, parce que je l’ai entendu lors de la soirée d’entrée. J’ai l’impression que des heures sont en train de s’écouler, alors que ce ne sont que des secondes. Et pourtant j’ai l’impression d’être là devant elle depuis toujours. Figée. Agis !

Pardon.

Et je m’écarte de l’embrasure de la porte. Mon regard se lève enfin jusqu’au sien. Je réalise que j’ai besoin de lui parler. J’ai besoin de savoir comment elle vit ce truc. Ce qu’elle en pense, ce qu’elle en comprend. Si ça compte pour elle. Si son esprit est aussi perdu que le mien. Si elle rentre dans les toilettes, c’est que je me suis juste imaginée plus que ce qu’il s’est vraiment passé. Si elle n’y entre pas, c’est que pour elle aussi, c’est + .  
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MessageSujet: Re: même si je sais -FRED   même si je sais -FRED Icon_minitimeJeu 25 Juil - 12:33






Tu restes là et rien ne passe...

Fred’. Ana.


L’attente devant cette porte, et puis cette voix. Sa voix. Non. Je ne pouvais pas la voir, je ne voulais pas la voir, je ne savais pas ce qui se passerait et alors… alors… je dois partir, avant qu’il ne soit trop tard. Avant qu’elle ne sorte et ne me voit. Je dois quitter cet endroit vite. Je ne dois pas la croiser. Ses mots qui résonnent dans mon esprit. Attention. Attention. Pourquoi est-ce qu’elle a dit attention ? Comment peut-elle parler normalement alors qu’elle a du reconnaître ma voix. Mais non. Elle va sortir. Je dois faire attention. A elle. À moi. Je ne veux pas avoir à faire attention à cela. Je dois partir, je ne veux pas la croiser, je m’en sens simplement incapable. Mais mes pieds refusent de bouger. Ils restent là, accrochés au sol et je ne fais qu’attendre. Attendre qu’elle sorte. Que le moment où je pourrais la revoir arrive. Alors que je n’ai qu’une envie. Fuir en courant. Mon corps refuse ce que mon esprit a décidé. Comme si lui savait…

La porte bouge, et finit par s’ouvrir, son regard qui se pose sur moi. Mon visage neutre et fatigué, je fixe mon livre du regard, je n’ose pas bouger, je n’ose pas la regarder. Depuis des jours que l’on fait comme si. Que l’on s’ignore. On savait au fond de nous que ce moment arriverait, qu’on serait amenées à se recroiser, mais j’avais osé espérer que cela n’arriverait pas, tout en priant pour que cela arrive. Je me rends compte que je n’attendais que ce moment. Depuis des jours. J’attendais de la revoir. Seule. Face à moi. Mais maintenant que c’est là… je ne sais pas ce que je dois faire. Encore une fois. Elle aussi regarde le livre. J’ai envie de hurler comme jamais je n’en ai eu envie. Le temps s’est arrêté, une seconde fois. Mais la magie n’agit plus. Le silence me fait mal, j’ai besoin qu’elle le brise, parce que je sais que je n’y arriverai pas. Je sais parfaitement que je ne pourrais pas le briser. Qu’est-ce que nous sommes censées faire ?

Tout est si compliquée avec elle, alors qu’au fond c’est si simple. On n’a rien fait comme les autres. La normalité est rassurante, la nouveauté me fait peur. Plus de repère, je ne sais pas comment agir. Je finis par lever le regard, par le poser sur son visage. Aucune larme ne vient le déformer cette fois. Ses cheveux sont secs cette fois. J’ai l’impression de toujours l’avoir connue les cheveux mouillés. Je ne la connais pas comme cela. Je dois oublier ce qui s’est passé, parce qu’il ne s’est rien passé au fond. Mais tout s’est passé. Je ne peux pas faire comme si ça ne compte pas alors que ça compte. Je ne peux pas mentir, je ne veux pas mentir, je ne veux pas me cacher, je ne veux pas cacher ce qui se passe en moi, même si je ne comprends pas ce qui s’y passe. J’ai besoin qu’elle me dise que pour elle aussi ça a compté, j’ai besoin de l’entendre dire que je n’ai pas tout gâché. J’ai besoin qu’elle me dise que tout va bien se passer. Que nous allons y arrivait. Mais elle ne le dira pas, parce que ça ne va pas bien se passer. Elle me fuit. Elle fuit mon regard. Elle fuit ma personne. Lui ai-je fait peur à ce point ? Notre réel ne l’aura donc jamais été ailleurs que dans mon esprit.

Déglutition difficile. Mon regard se perd dans son cou. Un médaillon que je ne lui connais pas le décore. Elle n’est pas seule. Je me sens plus seule que jamais. Pardon. Non. Je ne veux pas qu’elle s’excuse. Pas encore une fois. Pardonne-moi. Pardon. Je ne veux pas entendre cela. Je ne veux pas qu’elle s’excuse auprès de moi. Et ce regard, qu’elle lève enfin vers moi. Brillant. Doux. Perdu. Autant que le mien. Je ne veux pas bouger, je ne veux pas dire ou faire quelque chose que je regretterai. La vie est une suite de décision, une suite de choix. Je n’ai jamais réussi à choisir. La fuite semble si simple, si à portée de mains. Je la vois là, tout près de moi. Je n’ai qu’à entrer et à refermer cette porte. Sans même avoir à prononcer un mot. Ce serait si facile. Et l’ignorer. Comme hier. Comme avant. Comme tous ces moments depuis ça. Sa voix, son geste. Elle me semble si détachée de moi. De ce qui s’est passé. Suis-je donc la seule à avoir un mal de chien depuis ? Est-ce que ça n’a pas compté pour elle ? Est-ce que… est-ce que rien n’a eu de sens…  je ne veux pas que ça n’ait pas compté. Je ne le supporterai pas. Ma main se met à trembler sur le livre, inconsciemment, sans que je le veuille. Je soutiens son regard, la peur qui m’envahit. La peur de ce qui va se passer, de ce qui aurait dû se passer, de ce qui aurait pu se passer. Et un seul mot à ma bouche. Une seule interrogation. Qui refuse de sortir. J’ai besoin de comprendre. Je dois comprendre. Et son regard qui ne me lâche pas. Et sa voix qui résonne dans mon esprit. Ses excuses. Encore. Je n’en veux pas de ses excuses. Je ne veux pas ses excuses, parce que cela signifierait qu’on oublie. Et je ne veux pas oublier. J’ai besoin de savoir… briser le silence…

Pourquoi ?

Je ne sais même pas qui est supposé répondre. Elle ou moi. Je ne sais même pas s’il y a une réponse.



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MessageSujet: Re: même si je sais -FRED   même si je sais -FRED Icon_minitimeJeu 25 Juil - 15:18


La place est libre, elle peut passer, elle peut entrer dans les toilettes. C’est comme ça que ça devrait se passer. Quand quelqu’un vient frapper à la porte des toilettes, la personne qui les occupe sort et l’autre prend sa place, parce que c’est pour ça qu’elle était là, c’est pour ça qu’elle attendait devant la porte. Alors pourquoi elle ne passe pas à coté de moi et referme cette porte sur elle? Mon regard ne quitte pas le sien. Je la vois sans la voir, son regard semble vide et pourtant il y a tant de choses à y voir. Seulement je suis incapable d’y lire quoi que ce soit. Si seulement j’avais un moyen de savoir ce qu’il allait se passer entre elle et moi. Et en même temps j’ai peur de le savoir. Parce que je ne suis pas sûre de la voir en tant que Fred. Pas totalement. Parce que je vois en elle celle qui m’a quitté. Elle me fait tant penser à Jo. Alors qu’elles n’ont rien à voir, du moins je crois. Pourquoi tout ne peut pas être clair ? J’ai l’impression que toute ma vie se déroule dans un épais brouillard, depuis toujours. Si seulement tout pouvait être clair. Si j’avais vu clair depuis le début, elle serait encore là.

Je hausse les épaules. Elle me demande pourquoi. Pourquoi pardon. Je ne sais pas pourquoi. Je ne sais pas si c’est un simple pardon, un pardon du genre « oh excuse-moi j’étais sur ton passage ». Ou un pardon pour le reste. Pardon de t’avoir embarqué dans tout ça. De t’avoir impliquée dans ma vie parce que tu es entrée dans cette salle de bain à ce moment là, ce moment où je n’étais pas vraiment là. Parce que tu m’as vu là, alors que je n’étais pas là. Je ne sais pas ce que ce pardon signifie. On est là, toutes les deux, l’une en face de l’autre, encore une fois, et rien ne se passe. Peut-être parce que rien n’est supposer se passer. Tout ça n’était peut-être qu’une erreur, qu’une scène coupée dans le scénario, une scène que personne ne verra jamais, tournée pour rien, tournée dans le vide. Je pourrais partir, oui je pourrais. Mais rien ne se passe. Je ne bouge pas, je la regarde, encore. Je respire lentement, j’essaye de rester dans le monde réel. J’essaye de ne pas oublier où je suis, pour quelle raison, j’essaye de me souvenir que nous ne sommes pas seuls, jamais. J’essaye. J’ouvre la bouche, et les mots glissent, je ne les retiens pas.

J’aime ta voix. J’aimerais t’entendre, t’écouter parler pendant des heures.

Tout me semble tellement naturel tout d’un coup. J’ai l’impression de pouvoir dire ce que j’ai envie de dire. De faire ce que j’ai envie de faire. De vivre naturellement. Mais il me suffit de m’imaginer devant les écrans des caméras pour prendre conscience que tout ça n’est pas naturel. J’aurais tellement aimé que tout se passe normalement entre nous. Comme avec tous les autres candidats. Mais pour rien au monde je n’aurais voulu échapper à ce moment dans la salle de bain. Toutes mes pensées se contredisent, c’est un véritable enfer. Et si elle ne me répondait pas ? Que pourrait-elle répondre ? Et si tout ça n’était qu’un jeu pour elle ? Et si, et si. Mes mains se mettent à trembler, tout mon corps se met à trembler. A vibrer. J’ai peur. Je crois que je préfèrerais qu’elle s’en aille. Qu’elle fuit. Parce que je suis incapable de le faire moi-même. Mais si tu sautes, moi je saute, pas vrai ?
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MessageSujet: Re: même si je sais -FRED   même si je sais -FRED Icon_minitimeJeu 25 Juil - 19:31






Tu restes là et rien ne passe...

Fred’. Ana.


Je n’aurai pas dû venir ici. J’aurai du rester ailleurs. Ne pas m’approcher d’elle. Mais je suis là maintenant. Je ne pouvais pas prévoir de la croiser. J’aurai du laisser cette porte close. J’aurai du partir au moment où j’avais reconnu sa voix. Le pire est-il de savoir ou de ne pas savoir. Si l’on n’en parlait pas, la magie existerait au moins dans nos souvenirs. Dans notre mémoire. Au moins là-haut. Tandis que si l’on n’en parle, on brise ce rêve que l’on a vécu. Ce rêve si douloureux, si bon. Une voix me disait de ne pas me réveiller, de continuer à rêver, mais comme dans tous les rêves, nous ne connaissons pas la suite. Ana était Ana et je ne savais pas ce qu’elle représentait pour moi. Il n’y avait rien à en tirer, rien à en dire. L’ignorance totale. Ne pas savoir qui elle était. Ni qui elle était pour moi. Ni qui j’étais pour elle. Est-ce que je suis seulement quelqu’un pour elle ?

J’ai l’impression d’analyser chacun de ses gestes, chacune de ses paroles. J’ai l’impression de l’analyser perpétuellement, mais mon analyse ne donne rien qui vaille. Le sentiment que la scène se répète. Le cadre est différent, mais la scène reste la même. Les mêmes protagonistes, les mêmes silences, la même incompréhension. Mais l’ambiance est différente. Le rêve n’a pas recommencé. Le rêve n’est pas là. J’ai peur de ce que je vais entendre. J’ai peur qu’elle me réponde. Au fond, je préfère qu’elle se taise. Qu’elle ne dise rien. Et que je fasse demi-tour. Fermer les yeux, oublier ce qui s’est passé, ce qui ne s’est pas passé et dormir. Me relever et recommencer comme avant. Manger, dormir. J’en suis incapable car tout a changé. Notre relation est incompréhensible. Si on peut appeler une relation. Je ne sais même pas comment je dois appeler cela. Une amitié ? non. C’est différent. On ne se connait même pas. Pourtant j’ai l’impression de la connaître déjà tellement. Je reste là mais rien ne passe. Je ne veux pas qu’elle réponde, je ne veux pas qu’on s’implique plus que ce qu’on a déjà fait. Mais c’est trop tard. On est plus impliquées que jamais. Plus impliquées que personne. Personne ne peut comprendre. Les rapaces sont tournés vers nous. Une nouvelle fois. A l’affut. Du moindre mot. Du moindre geste. Et ils sont tous là, derrière leurs écrans. A espérer quelque chose entre nous. Un geste. Une violence. Une explication. Ou au contraire des larmes. Comme la dernière fois. Mais qu’est-ce que ça changera dans leur vie à eux ? Est-ce que ça changera quelque chose de savoir ce qu’on s’est dit ? Pourquoi est-ce que ça compte à leurs yeux alors qu’aux miens,… ça compte tellement. Je baisse les yeux, j’ai presque honte de ce qui se passe. De ce que nous sommes en train de faire. Le silence m’est insupportable.

J’aime ta voix. J’aimerais t’entendre, t’écouter parler pendant des heures. Mes yeux s’ouvre, mon cœur bat vite. Pourquoi est-ce qu’il bat si vite ? Pourquoi est-ce que cela me fait du bien d’entendre cela ? On devrait être en train de parler de nos vies respectives, chercher des indices sur l’autre mais non. Non. Nous sommes en train de nous dire des choses que nous ne devrions pas nous dire. Des choses qui nous font nous sentir… vivants. On ne promet rien à quelqu’un qu’on ne connaît pas. On ne dit pas des choses comme cela à quelqu’un qu’on ne connaît pas. Et pourtant je suis tellement heureuse qu’elle les ait dites. C’est pour moi qu’elle dit cela. C’est à moi qu’elle dit cela. Ici, il n’y a pas de doute. Pas de risque que ce soit Sascha que l’on voit à travers moi. Non, c’est moi et juste moi. Elle ne m’a pourtant presque pas entendu parler. On ne s’est pratiquement pas parlé. Et pourtant je sais qu’elle ne ment pas. Je sais que c’est plus vrai que tout.

Un sourire involontairement se colle sur mon visage, et j’ose enfin la regarder dans les yeux. Les miens doivent briller. Je n’en sais rien. Elle tremble, encore une fois. J’ai froid quand je la regarde, mais pourtant j’ai tellement chaud. Il faut que ça sorte. Il faut que tout ce qui est en nous sorte, parce que sinon rien ne pourra jamais aller entre nous. C’est un besoin. Inévitable. Sauf que j’ai peur de ce qui va sortir de moi. De ce qui va franchir mes lèvres. Je veux qu’elle sache. Qu’elle sache ce qui se passe en moi. J’ai envie de la réconforter, mais peur de sa réaction. Je crois que c’est moi que je dois réconforter. Je ne sais pas où sont les limites, je ne sais pas quelles sont les limites que l’on doit se poser ni celles que l’on devrait se poser. Le son s’énonce, seul, comme si ce n’était pas de moi qu’il provenait.

Je ne veux plus te voir pleurer… Ça fait trop mal…

Cela fait tellement mal. Mal à en crever. Et il faut le dire.



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MessageSujet: Re: même si je sais -FRED   même si je sais -FRED Icon_minitimeJeu 25 Juil - 21:10

C’est si bon de la regarder, ses yeux dans les miens. J’ai l’impression de la retrouver, de ne pas l’avoir vu depuis… mais non, c’est ridicule, je pense comme si je la connaissais depuis des années. Mais qu’est ce que c’est le truc dans cette maison ? Tout semble accéléré, tout semble plus fort, plus intense, plus important. Surtout avec elle. J’ai besoin d’aide, j’ai besoin de savoir. Je crois que juste une fois, j’aimerais connaître l’avenir. Et en même temps je n’ai pas envie de savoir. Parce que je veux laisser les choses se faire, naturellement. Encore et toujours ces contradictions. Je n’ai jamais été aussi paradoxale de toute ma vie. C’est vrai qu’avant tout était plus simple, c’était elle, et lui, et moi, et nous. Tout était simple. Il n’y avait rien d’autre, rien à comprendre, rien à penser. C’était juste nous. Mais c’était, ce n’est plus. Aujourd’hui, c’est elle, c’est Fred. C’est elle et moi, juste là, maintenant. Peu importe à quel point la situation est bizarre, peu importe qu’on ne sache pas quoi faire, quoi dire, peu importe que l’on reste figée l’une en face de l’autre. Peu importe, ça existe.

Que … quoi ? Qu’est ce que ça veut dire ? Qu’est ce qu’elle vient de me dire ? Sa voix, ses mots. Elle ne veut plus me voir pleurer. Elle souffre avec moi. Alors… ça compte. Pour elle aussi, ça compte. Pour elle aussi, ce n’était pas rien. Qu’importe ce que c’était, on l’a vécu. Peu importe ce pour quoi on vit, tant qu’on vit. Toutes mes interrogations s’envolent. Parce que ce n’était pas un jeu, parce que ça compte pour elle aussi. Ca compte autant pour elle que pour moi. Je le sens, je le vois. Je la sens si fragile, prête à tomber, à craquer, à se sauver, à tout arrêter. Ça fait trop mal… et je le ressens tellement. Je ne suis pas seule dans cette histoire. Elle est là, elle est vraiment là, tout autant impliquée que moi. Ca compte. Elle ne joue pas, ça compte. Je sens une vague de soulagement m’envahir, un sourire s’installe sur mon visage. Je suis soulagée de ne pas être seule dans tout ça. Dans ce tourbillon, dans cette incompréhension. Je ne sais pas si c’est un trop plein de sentiments, ou plutôt un manque, ou juste un malentendu qui dérape et qui dure trop longtemps. Je ne sais rien de tout ce qu’on vit. Je le vis, voilà tout. Mais cette sensation d’être complètement perdue me fait peur. Et mon sourire s’efface. Tout ça, tout ce qu’il se passe chaque fois que nous sommes ensemble, tout ça me perd. Ne pas comprendre, ne pas pouvoir rapprocher cette situation d’une autre, comparer, expliquer, ça me perd.

Pourquoi …. ? pourquoi je me sens si proche de toi ?

Et pourquoi on restait là, immobile, devant les toilettes ? Pourquoi était-on incapable de bouger ? Pourquoi était-on incapable d’agir ? Pourquoi rien ne se passe normalement ? Pourquoi on ne mange pas simplement un yaourt dans la cuisine, en faisant la conversation. Pourquoi ce lien ne ressemble à rien. L’inconnu me fait peur. On a peur de ce qu’on ne connaît pas. Mais si le danger était dans ce que l’on connaît ? Ce qu’il se passe ici, avec elle, me perturbe, plus que ça ne m’effraie. Et je sais que ma question est stupide, parce qu’elle n’aura pas de réponse. Parce que personne ne l’a. Ni elle, ni moi, ni ceux qui nous observent. Peut-être que eux savent ce qu’ils attendent de tout ça. Moi, je n’en ai aucune idée. J’avance dans le flou. Mais je veux la savoir à mes côtés.
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MessageSujet: Re: même si je sais -FRED   même si je sais -FRED Icon_minitimeJeu 25 Juil - 22:34






Tu restes là et rien ne passe...

Fred’. Ana.


Les cartes ne m’avaient pas indiqué cela. Ni l’horoscope. Toutes mes croyances ont-elles décidé de s’effondrer juste parce qu’elle est entrée dans ma vie ? Ou moi dans la sienne, je ne sais plus vraiment. Je pensais que tout était prévisible, j’avais besoin de le croire, pour me rassurer. Penser que je pouvais ne pas devenir folle à attendre les malheurs qui me tomberaient dessus. Les prévoir pour les éviter. Les prévoir pour les combattre. J’avais besoin de toute prévoir, tout planifier pour éviter les dérapages de ma vie. Mais je n’avais pas su prédire ce qui est en train de se passer. Ni ce qui a précédé. Et surtout pas ce qui va suivre. Je ne sais pas si je vais en souffrir, ou au contraire en rire. Mais je sais seulement que je me sens plus vivante que jamais. Plus vivante encore qu’avec Jo. Plus vivante encore qu’avec Stéph. C’est différent ici. Et c’est parce que c’est différent que je me sens vivante. Mais c’est parce que c’est différent que j’ai peur. Et cette peur qui ne disparait pas. Qui reste là. Enfoncée dans mon cœur. Enfoncée dans mon âme. Et enfoncée dans mon corps.

Et ce sourire qui apparaît. Ce sourire si calme. Si beau. Si apaisant. Ce sourire qui me rassure. Je n’ai pas dit de bêtise, je n’ai pas tout gâché. Je n’ai pas détruit ce je-ne-sais-quoi qui existe et qui est là. Je suis face à ce sourire, je suis la raison de ce sourire, je suis ce sourire, et il devient mien. Je veux graver cette image. A tout jamais. Ne pas l’oublier. Le sourire de l’innocence. Le sourire du bonheur. Le sourire d’Ana. Mon sourire. Notre sourire. Notre moment. Je ne veux pas gâcher cela, jamais. Le conserve enfermé, dans un tiroir de ma pensée. Le conserver, toujours. Affiché. Comme un poster que je n’enlèverai jamais. Comme une image emprisonnée. Mais libre de s’évader dans mes pensées. Je ne veux pas oublier ce moment. Je prie pour ne jamais l’oublier. Et ressentir à chaque fois ce même tourbillon dans mon cœur, cette même incompréhension. Ne pas savoir, avec Ana, me rassure presque.  C’est presque apaisant de se laisser aller au moment. Ne pas penser à la suite, parce qu’on ne la connait pas. Je ne veux plus chercher à expliquer, ni même à comprendre. Il n’y a rien à comprendre. Parce que c’est elle, parce que c’est moi. Rien de plus. Je ne veux pas chercher plus loin. Gâcher l’instant avec des mots, des définitions, des calculs. Tout doit rester inchangé, intacte. Pourquoi …. ? pourquoi je me sens si proche de toi ? Je ne sais pas Ana. Je ne sais pas pourquoi. Je ne veux pas le savoir. C’est là. C’est tout. Il n’y a pas d’explication, c’est là. Nos paroles sont courtes. Posées. Lentes. Mais tellement douces à l’oreille. J’entends presque son rire dans sa voix, celui qui m’avait tellement plu. Ce rire que je ne voulais plus lâcher. J’entends sa peur aussi. Son incompréhension. Mais aucune honte. Aucun regret. Je ne les entends pas. Je ne les entends plus. C’est seulement elle et moi désormais. Et nos voix qui montent ensembles, comme un ballet.

C’est là, c’est tout. N’en cherche pas la raison…

Profite juste de l’instant. Ma voix se perd. Je me perds. Avec elle. Nous nous perdons, mais je ne veux pas me rattraper. Je veux juste glisser dans ce moment, m’y laisser aller, m’y sentir vivante. Qu’importe la raison, qu’importe ce que les cartes diraient.



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MessageSujet: Re: même si je sais -FRED   même si je sais -FRED Icon_minitimeSam 27 Juil - 23:31


Sa voix me rassure. Sa présence me fait du bien. Je la retrouve, alors que je ne l’ai jamais vraiment trouvée, et que je ne l’ai jamais vraiment perdue. Mais j’aime être seule avec elle. Peu importe l’endroit. Et je ne sais pas pourquoi. Mais je veux suivre ce qu’elle me dit. N’en cherche pas la raison… Je ne veux plus me poser de question, je veux le vivre, simplement. Parce que c’est là, c’est incontestable. C’est là. Personne ne pourra nous dire le contraire. Personne ici, personne dehors. Je ne laisserai personne nous dire le contraire. Je veux la prendre dans mes bras, la protéger. Comme elle l’a fait. Je veux lui dire que je prends tout, que je veux tout vivre, que je me fous de nos questions, et de toutes les questions qui pourraient nous être posées. Je m’en fous, de ne pas savoir ce qu’on vit, ce qu’on est. Je m’en fous, elle est là. Et ça compte. Je compte, elle compte. On est là, c’est là, ici et maintenant. J’ai l’impression de revivre. De retrouver une vraie vie. J’oublie tout, mais je me souviens. Je me souviens. Je me souviens. J’aime me souvenir. C’est important de se souvenir. Je revis, je me sens vivre, avec elle, grâce à elle. Ici, et maintenant. Elle et moi. Peut-être un nous. Qu’importe sa nature. Je la ressens tellement. Je voudrais tout apprendre d’elle. Je voudrais qu’elle me parle, de ses peurs, de ses joies, de ses cicatrices invisibles mais indélébiles. Je voudrais partager. Je voudrais tout partager avec elle. Je nous imagine déjà. Parce que ça compte.

Qu’est ce qu’on fait de ça maintenant ? Je sais qu’elle sait ce que ce ça signifie. C’est notre ça, notre truc. Mais la panique me gagne, ce ça, ce truc, c’est tellement abstrait. Soudain, tout me semble irréel, tout me semble disparaître, comme si je n’avais rien vécu de tout ça. Comme si ça n’avait été qu’un rêve. Je ne peux pas croire que ce ne soit qu’un rêve. Je ne veux pas que ce soit un rêve. Mon regard l’appelle au secours, le voit-elle ? Ce truc qui nous a liées si précipitamment dans la salle de bain est-il assez fort pour qu’elle le sente ? Mais je ne veux pas qu’elle me sauve. Je ne veux pas qu’elle se sente responsable de moi. Je n’ai pas le droit de m’imposer à elle. Avec mon histoire, mon secret. Je n’ai pas le droit. Elle ne le mérite pas. Je dois dire quelque chose immédiatement, vite, il ne faut pas qu’elle ait le temps d’assimiler ce que je viens de dire, cette question sans réponse.

Je ne lui en laisse pas le temps.

C’est quoi ? Mon regard se fixe de nouveau sur son livre. Ton livre. C’est quoi? Se rattacher au concret, au matériel. On me l’avait déjà assez répété. Souviens-toi, le matériel peut aider. Je suis en train de tout détruire. Parce que mon esprit a tourné d’une seconde à l’autre. J’ai tout détruit. J’ai le cœur qui tape trop fort dans ma poitrine. Je ne veux pas tout détruire. J’aurais tellement voulu. Mais j’ai si peur, de ça. Je regrette déjà, je voudrais revenir en arrière, effacer mes derniers mots, me laisser emporter de nouveau. Mais aucune de nous deux ne semble assez forte pour porter ce ça, pour se laisser aller dans un labyrinthe dont on ignore même s’il a une fin.  
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MessageSujet: Re: même si je sais -FRED   même si je sais -FRED Icon_minitimeDim 28 Juil - 22:22






Tu restes là et rien ne passe...

Fred’. Ana.


On continue d’avancer dans le brouillard, mais on avance. Lentement peut-être, mais on avance. A notre rythme. Pas à pas. Mot à mot. Parole par parole. Je ne pense plus à la suite, à ce qui va se passer. Je sais que je risque d’en souffrir mais je m’en contrefiche, j’ai juste besoin de savoir que ça compte. Et ça compte. Pour elle, comme pour moi. Notre présence en témoigne. Nous sommes là et ça compte. Ne pas se projeter dans l’avenir, ne pas chercher à tout contrôler comme j’en ai pris l’habitude. Se laisser surprendre par la vie, Stéph dit toujours que je ne me laisse pas assez surprendre par la vie. Il faut que je réapprenne à croire aux autres, à leur faire confiance. Et surtout à lui faire confiance, à elle. Les autres, je ne sais pas, ça viendra, mais à elle, je veux lui faire confiance, parce qu’il le fait. Parce que ce qui se passe l’impose de lui-même. J’ai envie d’être là avec elle. Il n’y a aucun autre bruit que nous ici, devant cette porte des toilettes. Les autres ne sont pas là, ils n’existent pas, ils n’existent plus. Les caméras n’existent plus non plus. Il n’y a plus qu’Ana et moi. J’ai l’impression de la connaître comme je n’ai jamais connu personne, plus intimement et plus profondément que personne et pourtant je sais que nous ne savons rien l’une de l’autre.

L’instant est calme, doux, profond. Nos sourires le prouvent suffisamment. Sa voix qui résonne. Qu’est-ce qu’on fait de ça maintenant ? Moment d’hésitation , ma main se remet à trembler. Je ne veux pas décider pour nous deux, je ne veux pas décider d’une chose aussi importante et je ne peux pas ! Qu’est-ce qu’elle attend que je lui réponde ? Qu’est-ce qu’on va en faire ? Comme si elle attendait que je lui réponde qu’on allait en faire un album photo ou que sais-je ? C’est comme si l’on ramenait soudainement un rêve à l’état matériel des choses. Qu’est-ce que je suis supposée répondre à cela ? Elle regrette sa question, je le vois bien, elle la regrette déjà. Je ne sais pas ce que l’on est supposées faire de cela, je ne sais pas ce qu’elle veut qu’on en fasse, et je ne sais pas non plus ce que je veux que l’on en fasse. Mais je veux que ça existe. Ça existe, ça doit exister, mais quoi en faire ? Je… je ne sais pas, je ne peux pas savoir. Pas comme ça, pas à brule pourpoint. Je ne veux pas en faire quelque chose, je veux que ça soit. Les mots ne servent à rien maintenant. Et Ana qui continue à me fixer. Notre bateau prend l’eau et je n’arrive pas à l’en empêcher. Qu’est-ce que je pourrais lui apporter ? Qu’est-ce que quelqu’un comme moi pourrait lui apporter, apporter à ce ça, à notre ça ? Rien. Strictement rien.

C’est quoi ? Sa voix qui retentit à nouveau. Je ne comprends pas de quoi elle parle. Et comme si elle le savait, elle répond à ma question muette. Ton livre. C’est quoi?. Saleté. Je sens la saleté sur moi. Je me sens sale. Pourquoi ? La honte me submerge. Que va-t-elle penser de moi ? Je ne lis ni du Sartre ni du Kafka. Je ne lis pas de grand classique ni de livres de psychologie. Je lis simplement… cette chose ! Et cette chose ne compte pas, je ne veux pas qu’elle sache ce que je lis. Je ne veux pas qu’elle ait cette image de moi, je ne sais même pas quelle image de moi j’aimerai qu’elle ait. Mais pas celle-ci. Pas celle-ci d’une midinette qui lit des romans à l’eau de rose. Non pas cette image-là. Je ne veux pas qu’elle me juge, et je sais qu’elle va le faire si je réponds. Mes pas m’éloignent d’elle, sans que je le veuille vraiment. Un pas en arrière. Je la regarde, les yeux ronds, cachant du mieux que je peux le livre de mes deux mains. Deux pas, je ne sais pas ce qui se passe, je ne veux pas qu’elle parle de ce livre. Je ne veux pas parler de ce livre. Elle ne devait pas dire ça, ce n’était pas ce qui était censé se passer. Il ne peut pas se passer cela. Je ne veux pas répondre à sa question. Trois pas. J’inspire et fixe son médaillon. Ça, ça compte. Pas mon livre. Pas cette histoire stupide. Mais ça oui. Ma bouche s’ouvre et les mots forment des phrases, sans que je n’arrive à les contrôler.

Une histoire d’amour. De celles qui comptent. C’est fort. C’est compliqué. Je ne sais pas comment ça se finit… Je ne sais même pas au juste, je n’ai pas vraiment commencé ce livre. Mais je présume que c’est de cela dont il s’agit. Ce livre, ce n’était qu’une excuse. Un prétexte. J’ai honte de parler d’une chose aussi stupide et puéril. Ça ne compte pas, ça ne compte plus… C’est important ça, hein ? Pour toi ? Son médaillon. Je me contente de faire un léger signe de tête en sa direction. C’est si compliqué. J’ai de nouveau peur. Langues de bois et loi du silence. On évite ce truc.



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MessageSujet: Re: même si je sais -FRED   même si je sais -FRED Icon_minitimeLun 29 Juil - 21:59


Je la vois s’éloigner. Non, c’est pire que ça, je la sens s’éloigner. Elle m’échappe, je la perds. J’ai tout détruit. Je voulais tout vivre, tout construire, et j’ai tout détruit. En un instant, j’ai encore tout détruit. La bulle qui commençait à se reformer éclate encore une fois. Plus fort, plus bruyamment, plus brutalement encore. Mon cœur accélère à chacun de ses pas qui l’éloignent de moi. La distance physique, visible, n’est rien comparée à celle que je sens qu’elle est en train d’installer entre nous, nos vrais nous, pas seulement nos corps. Je le ressens, si fort. Et ça fait mal, bordel que ça fait mal. Je veux que tout ça cesse. Les larmes sont prêtes à surgir, je les ravale, avec trop de difficulté pour le peu de force qu’il me reste, face à elle. Je suis fatiguée de ravaler mes larmes, tout le temps, tous les jours, devant tout le monde. Je ne veux plus de ça.

Une histoire d’amour. De celles qui comptent. C’est fort. C’est compliqué. Je ne sais pas comment ça se finit… Ses mots, sa voix, me font encore plus mal. Je ne veux plus supporter ça. Je voudrais lui crier que j’aimerais que l’on soit les personnages de ce livre, de cette histoire. D’amour, d’amitié, de n’importe quoi, de ce qu’on veut, de ce qu’on a envie de créer, peu importe. Je veux qu’on vive quelque chose de fort, de compliqué. Qu’on ne sache pas comment ça se finit. Je veux qu’on vive ça ensemble. Ca hurle dans ma tête, mais rien ne passe la barrière de mes lèvres, que je serre, que je mords. Habitude qui me permet de retenir les larmes, du moins c’est ce que je m’imagine. Il faut qu’on arrête ça Fred, je ne peux pas en supporter plus. Mais ne me laisse pas. Tout ce qui traverse mon esprit y reste cloîtré. Rien ne sort. Je suis figée. Encore.

Je sens son regard, trop loin de moi, fixé sur mon médaillon. Ma main se pose instinctivement sur celui-ci. C’est important ça, hein ? Pour toi ?  Les larmes me montent aux yeux. Non, ça ne peut pas encore se terminer comme ça, je ne veux pas de larmes, pas encore une fois, pas cette fois. Je n’arrive plus à percevoir ce qui se cache derrière ses mots. Agressivité ? Lassitude ? Curiosité ? Je n’en sais rien, et comment pourrais-je le savoir. Je sens le métal froid de mon médaillon contre la paume de ma main. Je ferme les yeux, et son visage apparaît devant moi. Mais je n’ai pas envie de la voir, pas maintenant. Je dois vivre le moment, le présent, l’instant, maintenant, ici. Je dois me ressaisir. Mais lorsque mes paupières se relèvent, ma vue est embuée. Une larme m’échappe. Non, pas encore, pas question. Je ne veux pas encore pleurer devant elle. Mes muscles décident à ma place, je passe à coté d’elle, les yeux baissés, le pas rapide, et je m’enfuis. Loin. Encore une fois, je fuis. Sans un mot, sans explication. Si seulement elle savait à quel point elle compte, elle, maintenant.
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