Blind date - Ely

Messages : 252 Date d'inscription : 15/07/2013

Blind date
avec Ely

Tard dans la nuit, mais aucune idée de l'heure qu'il était réellement. Aucune idée et aucun moyen de le savoir. Tous les repères effacés. Quand on ne peut pas se fier à la position du soleil pour avoir ne serait-ce qu'une vague estimation de l'heure qu'il est. Il n'y avait que des étoiles, des étoiles magnifiques qui ne vieillissaient pas. Qui semblaient ne jamais vieillir. Intemporelles. Infinies.

Debout dans le jardin, Art les observait. Curieux. Capturer cet instant, immensurable, infini. C'était une autre de ces nuits chaudes, collantes, qu'il avait préféré passer avec les étoiles que seul, dans son lit. Une autre de ces nuits où il n'avait pas réussi à s'endormir, parce que son cerveau refusait de s'éteindre. Ou parce qu'il était éveillé dans les rêves de quelqu'un...

Les images de cette nuit noire, de ces étoiles magnifiques, de ce ciel intemporel étaient bien imprimées dans son cerveau. Il avait décidé de rejoindre la chambre. Il avançait, prudent, dans la Maison des Secrets. Ses sens en éveil, essayant de faire le moins de bruit possible. Parce qu'il ne voulait réveiller personne. Que personne ne devait être au courant de cette routine nocturne secrète. Se lever, observer les étoiles, retourner se coucher. Comme si de rien n'était. Tous les soirs. Son petit secret.

Mais cette nuit, quelqu'un allait être au courant. Parce que quelqu'un était réveillé. Quelqu'un qu'il aperçut à son retour dans la chambre. Quelqu'un était réveillé. Quelqu'un assis. En tailleur sur un lit. Il l'avait entrevu, un rayon de lumière faible produit par la lune l'avait éclairé un instant. Une tête blonde. Une femme. Il l'avait entrevue, mais maintenant que la porte était fermée, il ne la voyait plus. Nuit noire. Tous les repères effacés. Alors il avançait, lentement, à tâtons, dans le noir. La chambre. Audace soudain. Quand il pensait être à hauteur du lit occupé, il chuchota, timide.

Bonjour. Je... euh bonsoir, plutôt. Ou peut-être bonne nuit... Je peux m'asseoir ?

Peut-être qu'il l'avait rêvée. Peut-être qu'elle ne lui répondrait pas. Peut-être qu'il était loin du lit au pied duquel il voulait être. Peut-être qu'elle ne l'avait pas entendu. Peut-être qu'elle ne voudrait pas l'entendre. Peut-être que quelqu'un d'autre répondrait. Il ne le saurait jamais. Il était aveugle. Elle l'était aussi. Qui qu'elle soit. Sans repère, dans cette nuit sans repère.

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Blind Date.

Avec Art’.

Il fait toujours trop chaud ici, rien ne change. Ca fait déjà deux nuits que je suis dans la maison, enfin, que nous sommes dans la maison. J’ai trouvé mon étoile contraire, j’ai eu le droit d’intégrer la dite maison. J’ai eu le droit de la visiter à ma guise, de flâner par ci par là, de découvrir les coins et les recoins. Mais la pièce qui va m’être le plus utile va sûrement être la chambre. Chambre que je partage avec la moitié de des personnes dans cette maison. Je pensais que ça allait être le plus difficile, mais finalement c’est pas infaisable. Certaines personne ronflent, d’autres parlent –et racontent des chose très étranges … Qui est cette Mamie Anne qui est mignonne ?, nous en saurons plus pendant la prochaine nuit.

Si je vous raconte tout ça, c’est que je ne dors pas. Toujours pas. Je pensais sincèrement que dormir dans un vrai lit allait me faire tomber dans les bras de Morphée, mais pas du tout. C’est pas aussi simple que ça finalement.

J’entends du bruit. Pas celui d’une couette qui tombe, ni d’un oreiller retourné. Non, celui d’une personne éveillée qui se lève. Nous sommes dans le noir le plus complet, la personne ne doit absolument rien voir, la pauvre. Je prie pour son petit doigt, faites qu’il ne rencontre pas de coin de lit, s’il vous plaît, pour lui.

La porte s’ouvre et j’aperçois un rayon de lumière fait par la lune, je suppose que c’est Art, je l’ai entendu se présenter lors de la soirée, son nom est original, je n’ai pas pu m’empêcher de le retenir. Pour le moment je n’en ai pas retenu beaucoup, c’est tout moi.

Je décide de m’assoir en tailleur sur mon lit jusqu’à son retour. Je m’avance peut être en voulant l’attendre. Dieu seul sait où est parti Art. S’il est parti au toilette ça peut être court, surtout pour un garçon, ou alors ça peut être très long … Mais je ne préfère pas imaginer Art sur les toilettes à cette heures avancée de la nuit.
Ou alors il est parti chercher un verre d’eau, par cette chaleur ça ne m’étonnerai pas. Mais si c’est le cas, je lui conseillerai de prendre une bouteille d’eau directement, ça lui éviterai des levées nocturnes.

Je vois la porte s’ouvrir de nouveau, ça y est, Art revient… Avec les mains vides. Pas la peine de vous dire que je suis déçue. Maintenant je sais qu’il a été aux toilettes. Et j’ai l’image dans ma tête. Non ! Je ne veux pas.

« Bonjour. Je... euh bonsoir, plutôt. Ou peut-être bonne nuit... Je peux m'asseoir ? »

Il me parle à moi ? Je pense oui. En même temps nous ne devons être que les deux seuls veilleurs de nuit dans cette chambre… Mais sa voix semble lointaine, comme s’il était à l’autre bout de la chambre. Je pense qu’il s’est avancé un peu trop loin dans la chambre …

- Je suis plutôt de ce côté Art. Essaie de suivre ma voix, ça pourrait aider.

Et en effet quelques secondes plus tard je sentais sa présence face à moi. Je ne le vois, mais lui non plus. C’est pas plus mal, à cette heure ci je ne sais pas trop à quoi je peux ressembler.

- Oui bien sûr que tu peux t’assoir. Je t’ai vu te lever … Du coup je me suis levée à mon tour et j’ai entrebâillé la porte pour pas que tu me vois. Je t’ai vu aller dans le jardin et lever la tête, tu parlais à ta bonne étoile ?

Je ne disais pas cela pour me moquer, au contraire, je pense réellement qu’il y a des étoiles qui veillent sur nous…

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Quelques secondes de silence. Et enfin, quelqu'un répondit. Une voix. Cette voix calme, agréable. Une voix douce, féminine. Une voix qui réchauffait, mais qui paraissait extraordinairement lointaine. Pas de doute, il avait fait quelques pas de trop. Il était allé trop loin. Il n'était pas au pied du bon lit. Ses sens lui avaient fait défaut. Ils avaient menti. Alors il fallait qu'il fasse confiance à Ely. Ou plutôt au son de sa voix. Qu'il se laisse guider par ce doux chuchotement, par cette voix qui lui disait de la suivre.

Et grâce à elle, Art était arrivé à destination. Au pied du bon lit. Ce lit qu'il touchait, qu'il tâtait doucement. Avant de venir s'y asseoir à son tour, en tailleur, quand la jeune femme lui eut donné son feu vert. Art s'imaginait être en face d'elle, il les imaginait, ils les voyaient là, tous les deux, assis en tailleur aux deux extrémités de ce lit. Peu importe si la réalité était probablement différente de cette image mentale qu'il se faisait. Peu importe. C'était ainsi qu'il le voyait.

Le noir leur offrait cette possibilité de se mettre à nu. De parler sans se soucier de toutes ces choses qui font peur, qui effraient lorsqu'on peut voir son interlocuteur. Lorsque cet interlocuteur est une inconnue. Lorsque les mots qu'on entend sont accompagnés d'un visage. Cette nuit, il n'y avait que leurs voix. Pas de honte. Des sourires invisibles. Des mots. Pas de mensonges. Une voix franche, honnête, magnifique.

Oh alors tu m'as vu ? Tu aurais du me rejoindre, on aurait pu partager ce moment ensemble... Parce que le ciel est magnifique ce soir. Dégagé. On voit toutes les étoiles. Tu en as une, toi ? De bonne étoile, je veux dire. Parce que... pas moi. En tout cas, je ne l'ai pas encore trouvée, mais j'espère qu'un jour, quand je lèverais les yeux vers le ciel, elle sera là, devant moi, juste là...

En parlant, il avait fait tous ces gestes.. Des gestes qu'Ely ne voyait pas. Une habitude dont il était dur de se détacher. De s'habituer à ne pas voir, et à ne pas être vu. Et dans cette gestuelle inutile, Art avait frôlé Ely. Du bout des doigts, il avait touché sa peau nue, une partie de son corps. Son bras, sa jambe, peut-être son visage, il l'ignorait... Une peau brulante. Il avait rougi immédiatement, et heureusement, Ely ne le verrait pas. Mais la gêne. La gêne provoquée par ce contact physique inattendu s'entendait surement dans sa voix alors qu'il s'excusait maladroitement :

Oh, euh désolé. Je... je savais pas que j'étais si proche que ça...

Et machinalement, il se recula, jusqu'à être au bord du lit. Le plus loin possible. Un mouvement qu'il n'aurait probablement pas fait s'il avait écouté son cœur. S'il n'avait pas été Art, s'il avait pas été embarrassé constamment. Il sourit, en repensant à cette maladresse. Bizarrement, il sentait encore sur ses doigts la texture de la peau qu'il venait de toucher ; ses doigts semblaient être encore chauds de ce contact maladroit. Il l'avait touchée. Cette peau agréable, calme, douce. A l'image de la voix qu'il avait entendu et qu'il entendit encore...

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Blind Date.

Avec Art’.

Oui je t’ai vu, mais non je n’allais pas te rejoindre. Ces moments là il faut être seul pour … être seul. Je pense en avoir une d’étoile oui, avec ce qui m’est arrivé, je pense en effet qu’elle existe…

Par contre, lui, il n’en a pas… Comment est ce possible ? Je pensais que tout le monde en avait une ? Peut être a-t-il était méchant à un moment de sa vie, et qu’on lui a retirée ? Non, ce n’est pas possible. Je suis sûr qu’il en possède une, c’est juste qu’elle doit se faire discrète …

Je sens de l’air sur ma peau, je pense qu’Art est en train de gigoter ou de faire de grands gestes en parlant, je ne sais pas quoi exactement, mais il fait de l’air, ça ferait presque du bien.

Oh.

Il vient de me frôler. Je ne m’y attendais pas du tout, je deviens toute rouge. La seule chose qui peut me rassurée, c’est qu’il soit aussi gêné que moi… Peut être plus ? Ou peut être pas du tout. Non, connaissant un minimum sa timidité, je pense qu’il doit être encore plus gêné que toi.

Comme pour confirmer mes pensées, il me dit être désolé, qu’il ne savait que nous étions si proches. Et si, nous l’étions. Comme pour montrer qu’il l’était vraiment, il recula, je senti donc à nouveau de l’air.

Non, ne t’en vas pas. Malgré la chaleur dans la pièce, sa présence proche ne me dérangeait absolument pas.

- Ne t’inquiètes pas, ce n’était que mon oreille. Tu n’as pas senti le métal de mon piercing ?

Je m’avance vers lui pour retrouver le peu d’espace qu’il y avait entre nous deux avant qu’il ne recule. Et lui souffle ces quelques mots tel un secret,

- Fais attention, tu ne peux plus reculer devant moi maintenant, sinon tu risquerai de tomber dans le vide …

L’imaginer prit de panique, reculer et tomber sur les fesses me fit émettre un petit rire. Comme pour ne pas briser l’atmosphère paisible que nous avons installé, je continue de lui souffler mes paroles, à quelques centimètres de son visage.

- Ton étoile est bien là, ne t’inquiète pas. Elle ne se montre peut être pas autant que tu le souhaite, mais elle est bien là. C’est mon étoile à moi qui me l’a dit. Elles se voient entre elles. Tu le sais ça ? Peu de gens le savent.

Je marque une petite pause. Et je veux m’amuser. M’amuser de sa timidité. Pourquoi pas ? Nous sommes dans le noir après tout. Même si je vais être toute rouge de le faire, personne ne le verra. Surtout pas lui. Et puis, tout ce qui est fait dans cette chambre ce soir, restera dans cette chambre n’est ce pas ?

C’est ainsi que je m’avançai doucement de lui, le plus possible qu’il m’était permis de le faire sans le toucher. Il devait maintenant sentir ma respiration si ça n’était pas dé déjà le cas. Je ne sais pas à quoi il pense, ni à quoi moi je pense. J’improvise à chaque seconde.

Je vais agir dans peu de temps. Dans quelques secondes même. Et là, sans prévenir, je lui touche son oreille, comme si je voulais vérifier qu’elle était encore en vie.

- Nous sommes à égalité maintenant. Lui dis-je avec un clin d’œil.

Sauf, qu’il ne l’a pas vu mon clin d’œil dans le noir.

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Leur contact maladroit n'avait pas mis Ely mal à l'aise. Parce qu'elle savait ce qu'Art avait touché, elle savait que ce n'était qu'une oreille, elle n'avait aucune raison d'être mal à l'aise. Juste son oreille. Percée. Et au moment où Art s'apprêtait à mentionner le piercing en question, il le sentit. Un mouvement dans le lit. Un poids qui se soulève et qui vient se poser plus proche. Proche devant lui. Proches comme ils l'avaient été avant qu'Art ne recule. Alors leur proximité inattendue n'avait pas mis Ely mal à l'aise non plus... Et peut-être que, secrètement, elle l'avait appréciée autant qu'Art.

Joues rouges dans le noir. Parce que quoi qu'il en soit, il ne pouvait plus reculer. Derrière lui, le vide, il l'avait constaté d'un geste de main rapide. Il ne pouvait plus reculer. Il ne pouvait plus fuir cette proximité. Plus d'issue. Elle l'avait encerclé, elle venait de l'avouer. Elle l'avait piégé de la plus belle façon qu'il soit. Et voilà qu'elle était là, son chuchotement directement sur sa peau. Proche, très proche, tellement proche qu'Art pouvait clairement sentir sa respiration. Une respiration qu'il se mit à imiter. Respirer comme elle.

S'habituer à ce nouvel espace. Se l'approprier. Quand ce fut fait, Art repensa à cette oreille percée qu'il avait frôlée sans le savoir. Et maintenant qu'il savait, il fallait qu'il s'assure. Qu'il la retouche. Alors, dans ce nouvel espace, dans cette nouvelle proximité, la main droite d'Art vint parcourir les quelques centimètres qui la séparait du visage d'Ely. Elle vint d'abord effleurer délicatement l'endroit exact où Art supposait que l'oreille de la jeune blonde se trouvait et bingo. La main se posa doucement sur cette oreille qu'elle avait déjà touchée auparavant. Son pouce sur sa joue. Son majeur sur son cartilage. Le piercing en question. Acier glacial. Comme les mains d'Art.

Retrouvailles de deux peaux qui se connaissent déjà un peu et faible choc thermique. Contraste entre cette peau brûlante et cette main glacée. Peau brûlante, encore plus brûlante que dans ses souvenirs. Brûlantes, les joues d'Art devaient l'être également. Mais ses doigts étaient encore froids de ce temps passé immobile dans la douce fraicheur du jardin. Les joues d'Ely étaient chaudes, les mains d'Art étaient froides, ensemble, ils étaient tièdes. Et soudain, refroidir ces joues si chaudes apparut comme une mission divine. Comme un instinct primaire. Alors, rapidement, sa main gauche vint rejoindre l'autre, et bientôt, Art tenait le visage d'Ely entre ses mains.

Tu penses que nos bonnes étoiles sont amies ? Qu'elles s'entendent bien ? Je crois que la mienne est un peu timide, un peu réservée. Sûrement sourde-muette. J'aimerais lui dire de se manifester. Au moins une fois. Pour que je sache qu'elle existe. Tu penses que la tienne pourrait le lui dire pour moi ?

Ce service demandé sans grande conviction. Parce qu'Art avait abandonné l'idée de sa bonne étoile il y a bien trop longtemps. Mais il tenait à lui répondre malgré tout. Malgré tout ce que le silence disait déjà. Malgré ses mains toujours sur les oreilles d'Ely. Ses mains, qui avaient du filtrer un peu sa voix, empêchant certainement Ely d'entendre correctement ce qu'il venait de dire. Mais ce ne fut pas ce qui alarma Art... Parce que, quand il regagna contrôle de ses mains maintenant tièdes, il les remarqua. Ses pouces qui s'étaient mis à caresser les joues d'Ely sans qu'il ne s'en rende compte. Le naturel revint au galop et ses pouces arrêtèrent de bouger. Et ses mains se retirèrent et la gène se réinstalla.

Cet échange qui ne devait être que paroles, que voix, que chuchotement dans le noir... Cet échange s'était avéré plus tactile qu'Art ne l'avait prévu. Qui sait où ce jeu de main à l'aveuglette allait les mener. Désinhibés, libérés. Juste eux deux, le noir et la beauté du toucher. Toucher ce que l'on devrait voir mais qu'on ne voit pas. Toucher comme pour s'assurer qu'on existe vraiment. Qu'on est bien là. Que tout cela n'est pas qu'illusions. Toucher pour savoir. Rien de plus. Rien d’ambiguë, n'est-ce pas ? Parler pour couvrir le bruit de son cœur qui battait soudain très fort dans sa poitrine.

Pardon. Tu veux peut-être que... euh je te laisse dormir ?

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Blind Date.

Avec Art’.

Dans le noir, nos sens sont plus que doublés. Notre sensibilité est au plus haut point. Le décibel d’une parole peut être ressenti complètement différemment. La chuchotement devient alors la limite du tolérable. Un souffle d’une respiration peut vous faire ressentir une sensation qui n’est possible que dans un moment d’intimité.

Et pourtant. Nous sommes là. Dans le noir avec Art. Nous ne nous connaissons pas. Mais j’ai ce sentiment. Ce sentiment qu’au moindre mouvement, à la moindre parole, il peut se passer n’importe quoi. Il ne faut pas que ce moment s’arrête. Je n’ai pas ressenti ça depuis tellement longtemps.

Je sentis alors sa main sur mon oreille. Sa main devait être grande, son pouce sur ma joue. Il s’assure que je n’ai pas menti ? Oui, mon piercing est bien là. Tu ne dois pas reconnaître la forme je pense. Si ? Il s’agit d’une plume. Juste une plume.

Sa main est vraiment froide. Froide comme de la glace. Et moi, par la couleur rose tirée rouge de mon visage, le contraste est tel qu’il me semble avoir sentie comme une petite décharge. Décharge agréable. Et comme si une main ne suffisait pas pour que cette décharge existe, il posa son autre main sur ma deuxième joue. Ses mains froides encerclent mon visage chaud. Sans le vouloir j’émets un soupir. Un soupir d’aise. Sa fraîcheur me fait le plus grand bien.

Puis sa voix vînt briser le silence. Silence qui était accompagné de nos gestes l’un envers l’autre. Gestes qui peuvent vouloir dire plus que ce qu’ils étaient, ou finalement, peut être était ce notre façon à Art et moi-même de commencer à nous connaître. En nous découvrant dans le noir.

Oui, je pense sincèrement que nos étoiles sont amies, peut être même se sont elles déjà croisées, et qu’il s’agit là d’une retrouvaille, qui sait ? Mon étoile va peut être aider la sienne à se sentir mieux, à être un peu plus ouverte aux autres. Peut être que par la suite, l’étoile d’Art l’aidera à long terme dans la vie de tous les jours, à faire diminuer cette timidité qui peut l’handicaper dans certaines situations.

Pendant tout son discours, ses mains sont restées de par et d’autre de mon visage, tout le temps, avec ses pouces caressant mon visage. Comme si, il voulait que je comprenne bien ce qu’il me dit. Mot par mot. Syllabes par syllabes.
Puis il s’immobilisa. Peut être s’est il rendu du compte de ce qu’il disait. Ou la situation dans laquelle nous étions, il ne voulait peut être aller aussi loin. Pas être aussi proche physiquement avec quelqu’un, pas tout de suite du moins. Et ses mains partirent de mes joues. Peut être n’ai pas répondu assez vite, et il est maintenant déçu. Il m’enlève ma fraicheur. J’ai de nouveau chaud. J’ai l’impression de bouillir de l’intérieur. J’ai envie de lui crier de remettre ses mains sur mon visages et de continuer ses gestes. Comme si ces derniers m’étaient familiers et protecteurs. J’étais dans ma bulle avec ses mains sur mon visage. Pourquoi les a-t-il enlevé ? J’ai fais ou dis quelque chose de mal ? S’est il rendu compte de quelque chose qui m’a échappé ?

« Pardon. Tu veux peut être que … euh je te laisse dormir ? »

Non je ne veux pas. Pas après ces dernières minutes écoulées. Pas après ça. Il ne s’est rien passé d’extraordinaire. Le contact pouvait peut être même être qualifié d’amical. Peut être. Mais fait-on vraiment ça entre amis ?
Dans la pénombre de la chambre, nous étions toujours dans un espace restreint du bout du lit, malgré l’immensité de la chambre. Je voulais trouver les mots justes. Pas le brusquer, ni démolir notre bulle. Elle n’appartenait qu’à nous. Comme si parler normalement était une torture, mes chuchotements sortirent d’eux même.

- Non, je ne veux pas que tu me laisse dormir ? On a toute une vie pour dormir, ou à défaut toute l’aventure. Mais ce soir, cette nuit, je ne veux pas dormir. Je veux simplement que tu reposes tes mains sur mon visage. Que tes pouces reprennent leur manège comme s’ils étaient à leur place sur mes joues. Art, je ne te connais pas, et tu ne me connais pas. Mais cette nuit, sur le bout de mon lit, il n’y a que nous deux. Je veux que tu me parles, me racontes comment tu vois ton étoile sourde et mouette. Que tu me dises ce que tu ressens, là maintenant. Raconte moi n’importe quoi, peut importe. Je veux juste entendre tes chuchotements et ta respiration près de moi. C’est tout ce que je veux.

Pour clore ma requête, même si le résultat est le même, je ferma les yeux.

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Nuit silencieuse. Silencieuse de ce silence plein de tensions différentes. Ce silence qui ne pesait pas du tout, parce qu'il était infiniment doux. Et parce qu'il voulait dire tellement... Ce silence presque religieux, presque sacré, que le chuchotement vint rompre. Audace admirable. Le chuchotement comme un péché. Des paroles qu'Art, pêcheur, écoutait très attentivement. Parce qu'elles étaient les paroles d'Ely. Les paroles d'Ely, comme une prière, une délicate prière dans ses oreilles. Des mots qui caressaient son tympan. Un chuchotement adorable. Ely adorée. Art adorateur.

Cohésion. Ely ne voulait pas qu'il la laisse dormir et Art ne voulait pas la laisser dormir. Elle voulait qu'il repose ses mains sur son visage et il en avait envie plus que tout. Elle voulait qu'il parle et il avait envie de tout lui avouer. Art avait envie de chuchoter encore. De partager encore un peu de l'intimité de cette nuit avec Ely. Qu'ils chuchotent tous les deux. Qu'ils chuchotent toute la nuit et que la nuit dure toujours.

Alors, sans se faire prier, Art fit exactement tout ce qu'Ely avait demandé. Comme un bon soldat. Lentement, ses mains reprirent leur place sur les joues d'Ely. Une par une, elles vinrent se placer à l'endroit exact où elles avaient été. Comme si c'était leur place. Comme si c'était l'endroit où elles se devaient d'être. Absolument. Pour toujours. Comme si ses mains devaient être là et nulle part ailleurs. Presque machinalement, ses pouces se remirent à caresser ses joues tellement douces. Et enfin, l'ordre était rétabli. Tout était comme avant. Tout était à nouveau cohérent. Tout semblait juste. Correct. Art et Ely étaient comme un puzzle qu'on venait de finir.

Il rit. Son rire, quelques soufflements de nez. Discrets, doux, un peu saccadés. Des respirations fraîches qui avaient du atterrir directement sur le visage d'Ely. Il rit, parce qu'elle ne le connaissait pas. Et il ne la connaissait pas. C'était elle qui l'avait dit et elle avait eu raison. Plus que jamais, ils étaient des inconnus. Des inconnus qui ne s'étaient aperçus que très vaguement sous la lumière faible et traitresse de la Lune. Et si leur corps semblaient se connaître depuis toujours, Ely avait raison. Elle ne le connaissait pas. Et Art ne la connaissait pas. Alors tout naturellement, Art s'ouvrit. Lui offrir son cœur comme il lui avait offert ses mains. Générosité aveugle.

Parfois, le Monde avance beaucoup, beaucoup trop vite pour moi. Il court, et moi j'arrive plus à le rattraper, parce que j'ai déjà pris trop de retard. Je panique. Et tout, n'importe quoi, même la plus banale des situations, se transforme en épreuve, en challenge. La panique, la panique totale qui tourbillonne autour de moi. "Mais qu'est-ce que j'vais faire, comment j'vais m'en sortir, j'y arriverais jamais !"

J'ai l'impression que tout m'abandonne. Ma bonne étoile. Mon cerveau. Mon corps... J'ai l'impression qu'ils me laissent tous tomber, les uns après les autres, mais tous en même temps. Et ça m'inquiète, ça m'inquiète énormément, mais je peux rien faire pour y remédier, parce que j'ai déjà pris trop de retard. Qu'ils sont déjà tous partis.

Alors je reste là, immobile, au milieu de ce bordel, un bordel mental que personne ne remarque jamais. Mais, Ely... Ely, ton lit est magique. Parce que depuis que je suis dedans, avec toi, le bordel a disparu. Y'en a plus du tout. C'est fou, c'est comme si le Monde avait ralenti et que j'arrivais enfin à le rattraper...

C'est fou ce que tu es belle…

Ce courant sauvage de paroles qui était sorti peut-être un peu trop vite. Délivrance immense. Sourire invisible. Les muscles de son cou faiblirent sous le poids de ce secret enfin dévoilé. De ces confidences qu'il pouvait enfin faire. De cette honnêteté dont il pouvait enfin faire preuve. De cette peur d'autrui qui semblait avoir disparu. Et sa tête tombe doucement pour venir rencontrer celle d'Ely. Leur front, les uns contre les autres. Le bout de leurs nez qui se touchent... Cohésion. Elle avait voulu entendre son chuchotement, et maintenant, il voulait entendre le sien. Plus que tout au Monde.

A toi maintenant. Parle encore, s'il te plaît. Dis n'importe quoi. Je veux encore ton chuchotement...

Cette demande faite dans un murmure. Un souffle. Presqu'inaudible. Mais dans cette nouvelle dimension, dans cette nouvelle connaissance, il espérait qu'Ely l'entendrait sans problème. Parce que dans l'infinité de cette nuit, Art et Ely étaient réellement devenus infinis...

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Blind Date.

Avec Art’.

Et il s’exécuta. Tout simplement, sans poser de questions ou poser de conditions. Ses mains étaient revenues sur mes joues, une par une. Pour ne pas nous brusquer tous les deux. C’était ici qu’elles devaient être, pas sur ses genoux ou en train de chercher leur place ici ou là. Non. Elles devaient être sur mon visage. Et ses pouces recommencèrent leur manège en formant des ronds, doucement. Tout était redevenu comme l’instant passé. Le silence régnait toujours. Mais il n’était toujours pas pesant. Il était agréable et paisible. Rien que le son de nos respirations dans l’air.

Puis il se met à rire. Pour une raison qui m’est complètement inconnue, mais son rire est doux et cristallin. Peut-on le dire d’un rire de garçon ? En général nous l’entendons pour celui d’une fille, mais un garçon, jamais. Il s’arrêta de rire comme il commença, et j’attendais. J’attendais qu’il parle, qu’il me dise quelque chose. Et là, il commença. Il commença à parler, à se livrer, à me répondre à ma demande passée.

Je l’écoute, j’analyse et j’apprends. J’apprends que le monde va trop vite pour lui, qu’il n’arrive plus à le rattraper, il panique dans la plus banale situation. Je n’ose même pas imaginer son état actuellement. La situation est loin d’être banale, et pourtant il est encore là, devant moi.
Non, ton étoile ne t’abandonne pas, elle ne peut pas, elle est raccrochée à toi. Vous êtes liés tous les deux. Comme une ombre à son peter pan. Tu vois ? Mais il n’y a pas que son étoile qui l’abandonne, son cerveau, son corps, tout l’abandonne. Non, je ne l’abandonnerai pas. Tellement peu original. Mais non, je ne l’abandonnerai pas. Pas lui. Par après cette nuit.
Mon lit est plus que magique si tu savais mon Artichaud. Je ne tolère pas le bordel dans mon lit, tu le rattraperas le monde, prend ton temps, le monde t’attendra, tu seras à la même hauteur que lui, et je suis sûr qu’un jour tu le dépasseras. Tu regarderas derrière toi et tu te demanderas comment tu pouvais être en retard avant ? Alors que maintenant tu as plus d’une longueur d’avance sur lui. Tu anticipes tout ses mouvements. Tu es présent dans le monde et non l’inverse.

« C’est fou ce que tu es belle … »

Un électrochoc. Une décharge électrique. Personne ne m’a dit ça. Jamais. Je ne suis pas belle. Je suis lambda. Comme tout le monde. Je ne peux pas être plus rouge que je ne le suis maintenant. Ce compliment m’a sans doute achevé. Comme pour finir de me tuer à petit feu, son front se posa sur le mien. Comme si c’était la continuité de l’histoire. Son front est frais. Comment fait-il pour avoir une température corporelle aussi basse alors que l’air est chaud, bouillant même. Son nez touche le mien. Ce soir nos parties supérieure se touchent, nous n’iront pas plus loin lui et moi, cette atmosphère n’est pas faite pour ça. Lui comme moi ne cherchons pas ça.

Il souhaite que je parle. Que je dise n’importe quoi. Il veut mon chuchotement. Comme pour lui ressembler, je vais accéder à sa demande.

- J’ai l’impression de n’avoir rien à dire. Et pourtant, dans la vie de tous les jours je pourrai parler à un mur. Je perds mes mots ce soir. Je ne sais pas pourquoi. Enfin si, nous le savons tous les deux. Mais nous ne laissons pas nos visages en feu nous dissuader. Nous dire que, non, ce n’est pas nous de veiller le soir avec un inconnu dans le noir en chuchotant et en se découvrant physiquement. Car oui, il faut mettre des mots sur nos gestes Art. Nous nous découvrons. Je ne veux pas penser à demain, au soleil rentrant dans la chambre. A la lumière qui traversera la fenêtre. Parce qu’y penser, c’est penser à la fin de ce moment. A la fin de notre moment. De cette unique unité que nous formons, là maintenant. Et je ne veux pas qu’il s’arrête. Je ne peux pas m’imaginer vivre le même moment avec une autre personne. Ni avec toi en plein jour. Ca sera notre rendez vous du soir. Notre moment à nous.

Ses mains sur mes joues. Son front contre le mien. Comme pour me contredire je pose mes mains, qui étaient pour le moment sur mes cuisses, sur ses genoux. Une sur chaque genou. Je pense qu’il ne s’y attendait pas, je crois avoir perçu un léger sursaut …

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Messages : 252 Date d'inscription : 15/07/2013

La fraîcheur de certaines paroles, de certains mots. Cette sensation, dans son cœur. Comme une montée soudaine d'adrénaline. Comme se laisser tomber du plus haut gratte-ciel du Monde. D'abord doucement, et puis tout d'un coup. Et soudain, plus rien ne semblait compter. Même pas la Voix, même pas l'argent perdu, même pas les autres qui dormaient. Plus rien. Ces milliards de frissons à la fois chauds et froids, son corps qui se soulève, des sentiments. Art ne les connaissait pas. Ils lui étaient complètement inconnus et il se souvenait d'avoir un jour espéré qu'ils le resteraient toute sa vie. Inconnus. C'était mieux ainsi. Il pensait même ne pas être capable de les éprouver, mais il a eu tort. Encore une fois.

Et encore une fois, cohésion. Les mots d'Ely étaient si vrais qu'Art aurait pu les avoir pensé. Si beaux qu'ils auraient pu être tiré d'un drame romantique. Encore une fois, elle avait raison. Leur visages étaient bien en feu. Art savait ses joues brûlantes et il sentait celles d'Ely sous ses doigts. Tout aussi brûlantes. Ils étaient bien en train de se découvrir. De la façon la plus belle et la plus rassurante qui soit. Par le toucher. Et ensemble, ils ne voulaient pas que le Soleil se lève. Ni que demain arrive, que demain vienne piétiner leur intimité.

Ensemble, ils avaient les mêmes envies. Ensemble, ils étaient infiniment plus forts. Il y avait ce lien invisible, comme un câble, qui semblait les relier par le cœur. Le sentait-elle aussi ? Et soudain, ses mains vinrent se poser sur ses genoux. Un sursaut. Un instant pour se rendre compte. Un instant pour réaliser. Un instant pour se les approprier. Ces mains sur ses jambes. Un instant pour que ce nouveau contact semble aussi naturel, aussi indispensable que ses mains sur ses joues l'avaient été. Un instant pour que la balance se rééquilibre. Un instant pour que l'image du puzzle qu'Art et Ely formaient s'actualise.

Un instant trop long. Parce que le doute s'était installé. Non, quelque chose n'allait pas. "Ce n'est pas nous..." Non. Qu'est-ce qui te prend Art ? Qu'est-ce que tu fais ?! Comment as-tu pu oublier ? Les gens brûlent, les gens blessent, ils ne sont pas faits pour toi, t'es pas fait pour eux, arrête tout. Alors impulsivement, ses mains quittèrent les joues d'Ely. Parce que l'enfer, c'est les autres. L'enfer, ce soir, c'est Ely. Les mains d'Art vinrent rejoindre celles d'Ely sur ses genoux, avant de les en décoller. Et doucement, naturellement, leurs doigts s'entremêlent, son front se décolle du sien. Quatre mains, vingt doigts, une nouvelle union. Moins intime. C'était mieux ainsi. Trois mots sortent, comme un supplice.

Je peux pas…

Un aveu et son cœur venait d'être essoré. Penser à demain. Demain… Demain, quand le noir aura disparu. Toute la magie. Tout aura disparu. Quand il ne sera plus qu'Art et qu'elle ne sera plus qu'Ely… Même si sa poitrine souffrait de cette douleur brûlante, il ne semblait pas pouvoir s'arrêter d'y penser. De penser à demain. Et ses doigts qui n'arrivaient pas à se détacher des siens ne firent que l'entrainer plus loin encore. Plus profondément. Ce contact était devenu trop précieux, trop indispensable. Pourquoi ? Cette envie que la nuit ne s'arrête jamais. Que le temps s'arrête. Qu'il existe un moyen de rester au bord de ce lit, dans le noir, pour l'éternité. Irrationalité. Cette nuit noire était devenue vitale. "Ce n'est pas nous". Non. Pas du tout. Et pourtant...

J'ai peur, Ely. J'ai tellement peur. J'ai peur que l'éternité de la nuit s'arrête. J'ai peur que le Soleil vienne tout ruiner. C'est horrible, mais quelque part, j'espère qu'ils ne se réveillent jamais…

Un autre murmure, une autre prière. De cette voix chargée de tellement d'émotion. De cette frontière qu'il ne devait pas franchir. Qu'il s'était interdit de franchir. Fermer la porte à clef. La porte des larmes, de ces larmes chaudes, douloureuses et salées qui ne demandent qu'à sortir. De ce cœur qui veut se vider à tout prix. Qui déborde, qui aimerait pouvoir tout offrir mais qui est freiné. Ralenti par cette porte. Par l'interdit de l'ouvrir en grand. Par l'angoisse de déranger l'ordre. Ouvrir la porte. La porte de son cœur. Vulnérabilité. Ely. Je t'en supplie, ne t'en vas pas. Pas toi aussi...

Messages : 477 Date d'inscription : 03/09/2011 Age : 32

Blind Date.

Avec Art’.

J’ai fais ou dit quelque chose qu’il ne fallait pas. Je le sens. Comme pour me le confirmer, Art enlève ses mains de mon visage, et son front du mien. Le circuit est ouvert. Plus rien ne passe entre nous. Mes mains sur ses cuisses ne suffisent plus pour garder notre lien. Notre lumière s’est éteinte, dans la pénombre de la chambre. Pourquoi ai-je agit ainsi ? Je me doutais que ça n’allait pas lui plaire. Mais j’ai pris un risque. J’ai joué et j’ai perdu.

Il enleva mes mains de ses cuisses et les joignirent aux siennes. Nos doigts s’entremêlent. Mais ce n’est pas pareil. Rien ne le sera plus n’est ce pas Art ?

Nerveusement ou sincèrement. Ou peut être les deux. Une larme coula le long de ma joue. Larme s’accompagnant d’une pensée. « Je suis désolée Art, ce n’était pas nous. Je suis désolée. »

« Je ne peux pas ».

Ses mots viennent finir le travail qu’Art avait commencé en enlevant ses mains. Le message était clair. Tout est fini Ely. Ce n’est pas nous, ça ne l’a jamais été. Nous sommes des inconnus l’un envers l’autre. Ce n’est pas nous.

Ce n’est pas nous. Mais nous sommes quoi alors Art ? Deux personnes ayant peur de ce qu’il se passera si nous nous rapprochons ? Deux personnes qui dans le noir ne devraient pas jouer à ce jeu là ? Balivernes ! Nous sommes ce que nous voulons être ! Si nous voulons être quelqu’un de différent de la personne que nous sommes à l’extérieur, nous le pouvons ! Nous avons le droit d’être ce que nous voulons être.

Et là, ça sera nous.

« J’ai peur, Ely. J’ai tellement peur. J’ai peur que l’éternité de la nuit s’arrête. J’ai peur que le Soleil vienne tout ruiner. C’est horrible, mais quelque part, j’espère qu’ils ne se réveillent jamais… »

Ce murmure sonne comme un aveu. Une confession faire au creux d’une oreille. Une oreille attentive à la moindre tonalité de sa voix. Voix qui s’égare dans la nuit et est arrêtée par les murs de cette chambre.

Mon lit est devenu un radeau de fortune. Nous voguons au gré de nos murmures, nous nous éloignons de la côte et de nos colocataires. Nous n’allons pas les appeler à l’aide, nous ne voulons pas rentrer, laissez nous juste dériver. Jusqu’au moment où nous chavirerons pour cause de tempête.

Et maintenant ? Quelle est la suite logique de tout ça ? Lui et moi, sur mon lit, dans le noir, nos doigts entremêlés. Lui comme moi ne voulons pas partir. Rester là infiniment. Seuls. Sans personnes.

- N’ais pas peur. Je suis là. Tu ne le vois peut être pas. Mais sens-le. Sens mes doigts entremêlés aux tiens. Je suis bien là. Je ne partirai pas. Le soleil et l’éternité ont les emmerdes. Les autres ne se réveilleront jamais. Nous serons toujours là. Et si tout se brise pour une raison ou une autre, nous recommencerons. Cette sensation que je ressens, là maintenant, m’est devenue indispensable. C’est impensable je sais bien. Mais c’est ainsi. L’isolement sur un radeau à la dérive y fait sans doute beaucoup.

J’enlève ma main gauche de la sienne et cherche sa joue. Je la carasse, puis m’approche doucement pour y déposer un baiser. J’ai sans doute fait une autre erreur avec Art. Il est fort probable. Mais parfois, les impulsions ne se contrôlent pas forcément. J’ai été poussé à le faire. Je vais sans doute le regretter quand je vais m’apercevoir qu’Art décidera que quitter précipitamment mon lit pour retrouver le sien et finir la nuit déjà bien commencée… Je suis désolée Art. Encore.

Messages : 252 Date d'inscription : 15/07/2013

Ce n'était pas eux. Mais ce soir, d'un commun accord, ils n'étaient plus eux. Ensemble, ils avaient accepté de s'abandonner, de se laisser tomber pour ne faire qu'un. Impersonnels. Ils n'étaient plus Ely et Art, mais une toute nouvelle entité. Une nouvelle force, un nouveau pouvoir. Une machine qu'on ne pouvait plus arrêter. Deux aigles qui volaient, ensemble, au-delà du temps. Au-delà des autres. Au-delà de tout. Des molécules complémentaires. Et comparé à une telle fusion, tout le reste, tout le Monde semblait absurde. Futile.

La main d'Ely, sa caresse, puis ses lèvres sur la joue d'Art. Délicatesse. Sensualité. Ses lèvres, qui étaient venues se presser contre la peau de sa joue, puis s'en décoller quelques secondes plus tard. Un baiser... Frissons chauds. Ses lèvres... Ses lèvres comme un ordre rétabli. Ses lèvres comme un remède. Comme une pommade. Ses lèvres l'avaient guéri. Ses lèvres avaient emporté la maladie d'Art avec elles. Envolées les questions, envolées les craintes. Envolé l'Art. Et tout était à nouveau clair. Chimique. Essentiel. "Indispensable", comme elle l'avait si bien dit...

Art et Ely étaient indispensables. Leur machine était vitale. C'était maintenant sur, et Art s'en voulait d'en avoir douté. Douté de quelque chose de si évident. De si pur. De si beau. Maintenant, c'était sur. Maintenant, il savait. Tout était clair. Clarifié. Art savait qu'il fallait qu'il s'arrête. Qu'il se laisse tomber. Qu'il n'écoute plus ce qu'Art disait. Qu'il l'ignore comme si Art n'était personne. Comme s'il n'avait jamais existé. Qu'il n'écoute que son corps. Son corps contrôlé par son cœur. Son corps. Lui et personne d'autre. Ely et personne d'autre. Ely et ses paroles cohérentes, ses paroles qui soulèvent son cœur. Ely indispensable. Son baiser comme un pansement. Ely le remède.

Alors doucement, sa main droite vient se replacer très délicatement sur son oreille gauche. Doucement, très doucement. Comme une biche effrayée sortant de la clairière. Comme une lumière au bout du tunnel. Tout était clair. L'ordre qu'il avait brisé semblait à nouveau rétabli. Le puzzle. Essentiel. Indispensable. Art et Ely. Sa main gauche sur son autre joue, une respiration. Surprise. Malgré la justesse, la beauté du geste et de ce puzzle reconstitué, malgré tout... quelque chose avait changé. Parce que la tiédeur des joues d'Ely avait été remplacée par de l'humidité. Une goutte. Une larme.

Ely… Tu pleures ?

Question rhétorique mais spontanée. Spontanéité. Preuve qu'Art avait disparu. Et à présent, lui rendre son baiser apparaissait comme une évidence. Il l'avait brûlée... Art avait brûlé Ely et il fallait qu'il éteigne ce feu. Qu'il ferme la porte de ses larmes à double tour. Qu'il répare sa bêtise. Que tout redevienne comme avant. Que tout soit annulé. Qu'il n'y ait à nouveau plus qu'eux deux, plus que cette force nouvelle, sur un radeau à la dérive. Plus de larmes. Et parce que le baiser d'Ely avait guéri Art, il fallait que le sien guérisse Ely. C'était impératif.

Son visage qui s'approche à son tour de la joue d'Ely. Ses joues qui étaient occupées par ses mains... Un baiser, ailleurs. N'importe où. C'était la seule solution. Le seul remède. Un baiser, n'importe où. Art ne l'avait pas décidé. La pénombre interdisait la précision. Un baiser, sur le coin de sa bouche. A leur tour, les lèvres d'Art s'étaient pressées délicatement contre la peau d'Ely. Quelques secondes, avant de se décoller. Mais son visage, son visage était resté proche du sien. Très proche d'elle. Comme si ses mains et leurs baisers ne suffisaient plus. Comme si plus rien ne suffisait. Le corps d'Art était devenu avide. Avide d'Ely. Un petit rire nerveux.

Nos bonnes étoiles sont les meilleures amies du Monde… Ça ne fait plus aucun doute, maintenant.

Parce que, maintenant, c'était sur. Et maintenant, si leur union secrète venait à être brisée encore une fois, Art n'en sera pas responsable. Plus responsable. Plus Art. Art ne la brisera plus. Art ne la brûlera plus. Plus jamais. Les minutes, les heures, les secondes, le jour, la nuit, les autres, plus rien ne comptait. Et à présent, rien n'arrivera à les séparer. Rien... A part Ely. Ely et personne d'autre...

Messages : 477 Date d'inscription : 03/09/2011 Age : 32

Blind Date.

Avec Art’.

Il ne s’était pas enfuit. Il était toujours là devant moi. Je n’avais pas senti mon lit s’affaisser. Il est toujours là. Nous sommes tous les deux ici, encore un peu, dans le noir.

Je sens une main se placer sur mon oreille gauche. Tout le monde va penser que je n’ai que cette partie de mon corps qui est attractive, alors que pas du tout. Et là je sentais de nouveau ce sentiment. Le même. Le courant était revenu. La lumière de nouveau là dans mon cœur et dans mes yeux. Mais ça personne ne peut le voir. Seuls Art et moi le savons. Le sentons. Puis sa deuxième main rejoint mon autre joue. Je sursaute. Je ne pensais pas qu’il allait remettre ses deux mains. Le courant passe. Beaucoup plus ; Je sens l’électricité passé dans tout mon corps. La chaleur m’envahit de nouveau. Art est bien là. S’il te plaît ne part pas. Reste là.

« Ely… Tu pleures ? »

Ma larme était toujours présente sur ma joue, Art vient de la sentir. Il vient de s’en rendre compte. Non, je ne veux pas qu’il sache. Je ne sais pas quoi lui dire. Vérité ou mensonge ? Je ne sais pas. Si je lui dit la vérité, ne va-t-il pas disparaître ? Pourquoi ai-je toujours la sensation qu’Art puisse disparaître d’un moment à l’autre ? Comme s’il se rendait compte de ce qu’il faisait, et qu’il redevienne celui qu’il était.

Je sens une présence de rapprocher de moi. Le coin de mes lèvres. Je ne sais pas s’il le sait dans le noir. Mais ce qu’il vient d’embrasser c’est le coin de mes lèvres. Il ne s’agit pas d’oreilles, ni de nez, mais de coin de lèvre.

Si mon corps n’était pas assez chaud, sa température est maintenant à son maximum, je ne savais même que c’était médicalement possible. Peut être suis-je tombée malade ?
Il émit un petit rire nerveux. Son rire. Son ersatz de baiser. Je ne pourrai définitivement plus me rendormir.

Nos bonnes étoiles sont plus que meilleures amies du Monde. Elles sont peut être même indispensable l’une de l’autre. Elles se sont peut être retrouvées ce soir. Perdues de vue pendant des années, pris un autre tournant, et ce soit, ce sont elles qui se redécouvrent finalement.

Son visage était toujours proche du mien. J’ai envie d’agir. Je ne plus être moi-même et de ne le montrer qu’à Art. Je le veux lui. Simplement lui. Dans le pénombre de la chambre. Ses mains sont toujours là où elles doivent être. Je pose mes mains sur son visage. J’essaie de combler le vide entre nous. Je sens sa respiration sur mes lèvres. J’hûme son odeur. Je ne me reste qu’une petite frontière entre nous…

« Qu’est ce que t’es bonne Monique ! »

J’arrête tous mes mouvements. Il me semble même qu’Art et moi avons arrêté de respirer au même moment. Stanley est en train de parler dans son sommeil. Il nous ramène sur tête. Nous ne sommes pas seul dans cette chambre, ne l’oublions pas.

Je me décolle d’Art. Il enlève ses mains de mon visage. Il me semble tellement loin maintenant. Je ne peux que lui souffler quelques mots.

- Part. Rejoint ton lit. Essaie de te rendormir. Il a tout rompu cette andouille.

Je sens qu’il s’en va. Je reste assise dans la même position pendant encore un peu de temps. Je le regarde dans la pénombre rejoindre son lit à lui. Il est loin. Revient s’il te plaît.

- Dors bien Art.

Je m’allonge sous mon drap, pour finalement me remettre dessus. J’ai beaucoup trop chaud. Mon cœur m’a encore beaucoup trop fort. Mes lèvres sont encore beaucoup trop chaudes. Je ne sais pas si je vais réussir à m’endormir.

A plus tard Art.

Messages : 252 Date d'inscription : 15/07/2013

Ely comme une petite lumière faible. Comme une petite flamme fragile qu'Art protégeait de ses mains. Il tenait entre ses doigts la flamme la plus fragile du Monde. Une flamme qui semblait pouvoir s'éteindre au moindre coup de vent. Fragile. Leur échange l'était aussi. Et Stanley, cette voix dans la nuit, venait de le leur rappeler. Leur rappeler douloureusement que tout ne tenait qu'à un fil. Qu'ils étaient éphémères. Souffle coupé. Comme pour ne pas qu'il vienne éteindre la flamme.

Souffle coupé et cette envie d'arrêter de respirer à tout jamais. Soufflé coupé, parce qu'on sait, parce qu'on sent que le moment était venu. La fin. Le moment qu'ils redoutaient. Quitter son lit. Quitter leur petite infinité. Quitter cet îlot. Quitter Ely. La quitter. Comme une déchirure. Profonde. Douloureuse. Nécessaire. Retour sur Terre. A la réalité. En même temps, ils semblaient s'être réveillés du même rêve.

Ils savaient. Le départ était apparu comme une évidence. Encore une fois, cohésion. Pour la dernière fois, cohésion. Ensemble, ils se détachèrent. Leurs mains se détachèrent de leurs joues. Comme une prise électrique qu'on débranche. Ce lien qu'Art avait brisé à plusieurs reprises. Jamais il n'avait été aussi douloureux de le briser à nouveau. Surtout maintenant qu'il venait d'être récrée. Ce lien s’essouffla. Ce lien disparut. La flamme s'éteignait. La lumière du jour arrivait. Elle allait prendre le relai. Et Art devait s'en aller. Quitter son lit. Quitter la magie. Quitter Ely, avant qu'il soit trop tard. Un dernier chuchotement dans le noir. Comme un supplice.

Bonne nuit, Ely.

Et lentement, ses jambes se déplièrent. Lentement, il descendit de ce lit. Lentement, il rejoignit le sien. Et lentement, il vint s'y asseoir en tailleur. Constatant dans le noir cette distance. Cet écart qui le séparait maintenant d'Ely. Cette nuit, il ne dormit pas. La magie gardait ses yeux ouverts. La douleur gardait son cœur occupé. Et ses jambes semblaient vouloir garder à jamais cette position qu'elles avaient eu sur le lit d'Ely. Un nouveau jour arrivait. Lentement. Un nouveau jour. De nouvelles épreuves. Un nouveau Monde et bientôt, une nouvelle nuit. Une nouvelle Ely.

-RP TERMINE-

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Blind date - Ely

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