Vous n'êtes pas responsable de la tête que vous avez mais vous êtes responsable de la gueule que vous faite.
ft. Laury
 

Une tâche de glace au chocolat. Sur sa robe jaune poussin. En plein milieu de sa robe jaune poussin, même. Si seulement elle était plus soigneuse. Et moins maladroite. Au moins une fois dans sa vie... Mais non, il fallait qu’elle se tâche, qu’elle salisse tous ses habits, tous les jours au moins une fois. C'était comme si, si elle ne faisait pas ça juste un jour, c'était tout un équilibre de vie qui était ruiné. Alors qu'à part Vanish Oxi Action, qui ferait faillite sur le champ, rien ne changerait.

Elle aimait préparer ses habits la veille et les poser au pied de son lit. Comme ça, au réveil, elle n'avait qu'à les emporter avec elle et aller les enfiler directement aux toilettes. Elle faisait ça depuis tellement longtemps qu'elle avait complètement oublié quand l'idée lui était venue. Mais ce matin, tout ce qu'elle trouva au pied de son lit était cette fichue robe jaune avec cette fichue tache marron en plein milieu...

Ce matin, il fallait donc qu'elle fasse un détour par le dressing pour aller prendre autre chose. Voilà qui ne lui donnait pas du tout envie de se lever. Elle resta alors encore un instant de son lit et elle tendit l'oreille. A part un peu de remue-ménage dans le couloir, elle avait l'impression que tout le monde dormait encore. Tant mieux, au moins personne n'allait voir son pyjama vert pomme. C'est donc la tête encore profondément enfouie dans... ses rêves (pas de vulgarité s'il vous plait) qu'elle se dirigea vers le couloir reliant le dressing et les chambres.

"Je ne vais pas vous en faire un poème, votez Owen" fut la première chose qu'elle vit en ouvrant la porte de la chambre. Elle sourit. Décidément, ces nominations étaient dans la tête de tout le monde, c'était une obsession. Si elle trouvait l'idée plutôt bonne malgré la rime plutôt moisie, elle n'avait qu'une vague idée de qui Owen était et elle ne pouvait donc pas aller le féliciter. Elle venait en effet d'arriver dans la Maison des Secrets et n'avait eu le temps de sympathiser qu'avec très peu de gens dans le jardin.

Arrivée dans le dressing, il n'y avait personne. Ouf, le pyjama vert allait resté inconnu de tous un jour de plus. Rapidement, elle ouvrit son placard et sourit. Ici, comme chez elle, elle avait pu ranger ses habits par couleur. Rouge, orange, jaune, vert, bleu et violet, dans l’ordre. Grâce à ce rangement relevant de certains troubles obsessionnels du comportement, elle trouva sans aucun mal exactement le T-shirt qu'elle avait envie de porter aujourd'hui. Rose avec un tout petit Porcinet qui faisait coucou en bas à droite.

Elle prit également un short au hasard et son maillot de bain préféré. Satisfaite de son choix, elle fit un tour sur elle-même pour sortir du dressing et se mettre en route vers les toilettes. Et c'est là qu'elle le vit. Owen, là, debout derrière elle, seul, immobile, dans le cadre de la porte du dressing, une expression "sadique" sur le visage. Juste par là où elle s'apprêtait à passer. Comme elle ne pouvait pas partir en courant, elle sursauta, fit un pas en arrière et cria :

AAAAHHH MON DIEU !  

Réflexe de survie, elle avait même brandi son T-shirt, prête à fouetter la bête avec si cette dernière l'attaquait. Depuis son adolescence passée à regarder des films d'horreur tous les Samedis soirs, les gens immobiles là où on ne les attendait pas lui faisaient bien plus peur que les gens qui essayaient de l'effrayer volontairement.

Au bout de ce "court" moment de panique, Laury plissa les yeux et elle reconnut son agresseur. C'était Owen, le gars des affiches. Elle poussa un soupir et se mit à rire. Comme à chaque fois qu'on l'effrayait pour rire. Et comme à chaque fois qu'on effrayait quelqu'un en fin de compte. Puis elle remarqua qu'elle était toujours dans cette position d'attaque loufoque. Auto-dérision, elle déclara avec un accent du tierkar tmtc kon plézent pa :

Aya j'ai failli te mettre la misère avec mon T-shirt Porcinet ! T'as eu de la chance pélo, de là où je viens on rigole pas c'est moi qui te le dis uesh !

Une nouvelle fois, elle rit. Comme si elle était pas encore assez ridicule comme ça, il fallait qu'elle dise... ça. Elle s'empressa de ramasser les affaires qu'elle avait fait tomber tout à l'heure dans sa terreur et les serra contre elle, pensant qu'il n'était pas encore trop tard pour cacher le pyjama vert pomme. Une telle agitation de bon matin l'avait essoufflée. Elle posa la main son cœur et s'écria, d'un air paniqué :

Par contre, je-je crois que tu viens de casser mon pacemaker, là..

Et une fois encore, elle éclata de rire.

Vous n'êtes pas responsable de la tête que vous avez mais vous êtes responsable de la gueule que vous faite.
ft. Laury
 

Décidément, cette matinée n'avait rien d'ordinaire. Mais bon, on dit bien que la routine est mortelle, non ? Et puis, ce n'était pas un réveil désagréable, au contraire. Elle trouvait Owen drôle et était contente qu'il soit venu la trouver ce matin, même si ce n'était que pour lui faire peur. Avec tout ça, elle en avait presque oublié la politesse ! Elle s'empressa donc d'aller lui faire la bise, avec un peu de retard, mais tout de même :

On dirait bien que je me suis trouvé un nouveau Dieu, alors ! Owen, c'est ça ? Bien dormi ?

Si elle était maintenant sure qu'elle n'allait pas faire de la porcinification sa nouvelle arme de choix, au moins elle avait fait rire Owen un minimum avec son attaque plus ridicule que dangereuse, et ça la rendait heureuse. Elle remarqua cependant qu'il avait l'air préoccupé par son ramassage hâtif d'habits. Mince, il avait remarqué. Bon, l'honnêteté est la meilleure politique, pas vrai ? Elle avoua donc, honteusement :

Ok, j'avoue tout, mon pyjama est super moche, voilà, c'est dit, ne me juge pas s'il te plait

Sans en dire plus, elle lâcha la pile d'habits froissés pour laisser le jeune homme admirer le/vomir à la vue du pyjama vert pomme. Elle lui lança un petit regard en guise d'appel à la compassion, puis se mit à rapidement replier ses habits pour qu'ils n'aient pas trop l'air de sortir d'une pile d'habits sales quand elle les mettra tout à l'heure.

D'ailleurs, il allait falloir qu'elle s’éclipse à un moment ou un autre pour enfiler tout ça, elle était loin d'être prête à assumer un tel pyjama devant toute la Maison. Mais pour l'instant, ça attendra !

Demander à quelqu'un s'il a mangé du clown, c'est pas ce qu'on dit aux gens lourds ? Aux gros nuls qui essayent de faire des blagues qui ne font rire qu'eux ? C'était vraiment comme ça qu'Owen la voyait ? Oups ! Elle était à présent clairement embarrassée, tant par son pyjama que par cette blague pourrie. Elle choisit cependant de faire bonne figure et répliqua, d'un ton ironique, comme pour rattraper le coup :

Serais-tu en train de m'accuser de cannibalisme ?

Une campagne de propagande ? Encore une fois, l'idée était originale. Ce n'est que lorsqu'Owen prononça le slogan qu'elle avait lu un peu plus tôt sur cette affiche qu'elle s'en souvint. De cette bonne idée et de cette rime qu'elle avait trouvée pourrie, mais qui sonnait finalement plutôt pas mal à l'oral. Elle rit avant de sautiller sur place et d'agiter son poing dans les airs en s'écriant :

Oh, tu veux être président ? J'en suis, ça va être trop bien ! Owen président, Owen président !

Elle était tellement enthousiaste qu'on lui propose ça, à elle, de bon matin, qu'elle avait presque tout oublié. L'embarras, les caméras, la fatigue, les petits yeux fatigués qu'elle aborde au petit matin habituellement, la blague nulle qu'elle venait juste de faire, le jeu... Tout, sauf son pyjama. Elle déclara donc, gênée :

Mais avant ça, il faudrait peut-être que j'aille me changer... Bouge pas, j'en ai pour une seconde, même pas ! T'aurais à peine le temps de réciter l'alphabet à l'envers que je serais revenue

Et elle s'en alla en coup de vent aux toilettes, pour en ressortir fin prête. Heureusement à l'allée, elle n'avait croisé personne susceptible de rire de son pyjama. Lorsqu'elle avait enfilé le fameux T-shirt Porcinet fouetteur de monstres, elle n'avait pas pu s'empêcher de sourire. Elle se regarda rapidement dans une glace. Mouais, on avait connu mieux mais encore une fois, ça fera l'affaire.

Toujours en chemin pour rejoindre Owen, elle entreprit de rassembler tous ses cheveux pour les attacher en un chignon décoiffé, pour qu'ils ne la gênent pas pendant qu'elle s'activera pour rassembler un maximum de votes pour la "campagne de propagande" de son colocataire.

De retour dans le dressing, elle constata avec joie qu'il n'avait pas bougé. Il n'avait même pas eu l'idée de se re-cacher pour lui re-faire peur, non, il l'avait attendu patiemment. Elle lui offrit donc un grand sourire en guise de remerciement, avant de demander, comme un petit soldat :

Ok c'est parti ! Quelle est la marche à suivre, chef ?

Vous n'êtes pas responsable de la tête que vous avez mais vous êtes responsable de la gueule que vous faite.
ft. Laury
 

Les hostilités étaient lancées : après ces présentations express et très en retard, Laury répondit par un hochement de tête et un sourire à la question d’Owen concernant son prénom. Le jeune homme enchaîna ensuite en lui demandant de juger les lits de la Maison des Secrets. Une question qu’elle ne s’était encore jamais posée. Parce qu'elle avait dormi dans tellement de lits que la qualité de ces derniers lui était maintenant bien égal, du moment qu'elle arrivait à s'endormir en moins d'une heure.

Après un petit temps de réflexion, elle lui répondit donc que ça allait, même si rien ne valait son lit à elle. En fin de compte, le problème venait surtout de ces draps... Peut-être qu’ils n’utilisaient pas d’assouplissant au pressing de TF1, mais les draps étaient tous toujours tellement rugueux que c’était presque irritant pour la peau de dormir dedans. Comme une rappe à fromage. Elle ajouta d’un ton rieur :

Octroie-toi une petite séance d’essayage de lits un de ces quatre, moi c’est ce que j’ai fait ! Dès mon premier soir dans la Maison, plouf dans tous les lits. Comme chez Ikea

Elle sourit à cet aveu, comme pour rassurer Owen sur son état mental. Il entreprit alors de juger son pyjama en toute honnêteté, ce qui la rendait au départ un peu nerveuse, mais finalement, le commentaire de son colocataire la satisfaisait. Parce que reprocher à son pyjama d’être un peu trop vert pour être vrai était tout à fait légitime. Même si le vert reste une couleur cool à porter pour les grandes occasions, malgré tout.

La conversation continua et ils parlaient maintenant de secrets. "Je suis cannibale" ferait effectivement un bon intitulé, dur à cacher, mais un bon secret tout de même. Elle rit, avant d’ajouter, faussement gênée :

Mince, tu m'as démasquée ! Bon, promis, je te mangerais pas. Croix de bois, croix de fer, si je mens je vais en enfer... Et accessoirement en prison, parce que j’aurais quand même mangé un être humain.  

Un dernier petit rire et c’était le moment de se lancer une bonne fois pour toutes dans cette campagne présidentielle digne des plus grands. Le plan d’attaque exposé, il fallait se mettre au boulot. Mais avant ça et pendant qu’Owen s’activait à trouver une feuille et un marqueur, elle entreprit de s’étirer. Certains de ses os craquaient bruyamment, rompant le petit silence qui s'était installé et l’embarrassant à nouveau un petit peu.

Lorsqu'elle jeta à nouveau un coup d’œil à son colocataire pour s'assurer qu'il ne les avait pas entendus, elle et ses os bruyants, elle ne le trouva pas en haut, mais quelques étages en bas. En effet, il était allongé à plat ventre devant sa feuille de papier en train de dessiner. Laury fut un peu surprise, car c'était là une des rares fois qu’elle était "plus grande" que quelqu'un et la première fois qu'elle regardait Owen de haut.

Installé ainsi sur le sol en train de dessiner, il lui faisait penser à un enfant. Un gamin qui ferait un dessin pour sa mère, pour la fête des Mères. Et malgré son aversion certaine pour les enfants, devant cette scène Laury ne put s’empêcher d’esquisser un sourire, attendrie. Elle prit place en tailleur à côté de lui pour regarder ce qu’il faisait au-dessus de son épaule.

Quand il eut fini, il déclara fièrement que c’était lui qu’il avait dessiné, avec cette même attitude enfantine qui l'avait fait sourire tout à l'heure. En bonne Owiste/Owenienne/personnenesaurajamais, elle félicita son Dieu avec enthousiasme. C'était vrai qu'il était doué et c’était sûr que ça allait être plus qu'efficace pour sensibiliser la jeunesse. Elle eut une idée et son sourire s’élargit immédiatement. Sans dire mot, elle lui prit le marqueur délicatement des mains avant de dessiner une banane dans les mains de l’Owen miniature. Elle déclara, d'un ton solennel :

Quoi de mieux que des bananes pour réussir sa campagne ?

Assonance. Moins bonne que celle qu’Owen avait trouvé pour son slogan, mais assonance tout de même ! Elle sauta sur ses jambes en riant. Décidément, faire preuve d'une telle bonne humeur de bon matin était rare pour Laury. Elle se mit à fouiller dans le dressing devant lequel ils se trouvaient sans savoir à qui il appartenait. Pour le moment, il leur fallait une banderole et elle savait exactement ce qui pouvait en faire office.

Elle sortit donc un drap blanc du placard, un de ces draps rugueux qu’elle détestait, et se mit à le déchirer sans scrupules jusqu'à ce qu'il ait la forme désirée. La forme d'une banderole. C’était un peu brouillon, il y avait des fils qui partaient de partout sur les côtés déchiré, mais ce n'était rien qui ne pouvait être arrangé avec quelques coups de ciseaux.

En tout cas, le drap n'émettait aucune résistance aux gestes brutaux de Laury, c'en était presque trop facile de le déchirer. Soit ils étaient vraiment d’une qualité méga-médiocre, soit Laury avait fait preuve d’une force herculéenne sans même avoir bu de lait... A la réflexion, c'était très certainement un peu des deux finalement.

Elle plaça soigneusement le drap déchiré à plat sur le sol devant Owen, toujours couché sur le ventre. Malheureusement, le drap était un peu trop grand (ou le dressing un peu trop petit) et elle ne put pas le disposer complètement à plat. Avant de reprendre place à côté du jeune homme, elle lui demanda, en désignant le dessin de ce dernier "en plus mignon" et tenant une banane :

Tu penses pouvoir reproduire ton dessin en grand comme ça ou je déchire encore ?

En attendant sa réponse, elle restera debout en face de lui, la banderole les séparant. Encore une fois, c’était vraiment étrange pour elle de s'adresser à quelqu'un "de là-haut". Si elle se demandait comment il faisait au quotidien, elle ne se rassit pas. Car de toutes manières, il fallait qu’un d’entre eux s’en aille chercher des ciseaux pour couper tous ces fils... et des feutres de couleurs, si toutefois il y en avait. Pour décorer la banderole afin qu'elle attire l’œil du potentiel votant !

Vous n'êtes pas responsable de la tête que vous avez mais vous êtes responsable de la gueule que vous faite.
ft. Laury
 

Owen parlait beaucoup, il s'emportait, divaguait et semblait avoir une bonne humeur inébranlable. Depuis le début de l’aventure, Laury attendait ce moment où elle pourrait enfin copiner avec quelqu'un comme ça, sans qu'il y ait de malaise, et ce moment était enfin arrivé. Ce sourire béat collé à son visage, elle lui avoua qu'elle était persuadée que personne n’allait jamais à Ikea sans repartir avec au moins un petit crayon Ikea gratuit, c'était devenu un rite avec le temps.

Ses aventures chez Ikea étaient loufoques, et ses projets de campagne électorale via questionnaire service client étaient prometteurs et plus qu’originaux. Qui penserait à chercher des votants dans le personnel d’Ikea ? Hein, qui ? Certainement pas François Hollande ! Cependant, il y avait un hic et Laury ne manqua pas de le souligner, en bonne conseillère pour futur président/première et seule adepte :

Mais on sait tous que la prochaine fois que tu iras chez Ikea, tes fans te poursuiveront, tous tes électeurs seront là, ils te demanderont des autographes et des photos, ils te traqueront et tu devras te cacher dans une armoire MORVIK !

Elle lui fit un clin d’œil. C’était le seul nom de meubles Ikea qu’elle connaissait, parce que le seul qu’elle possédait. Elle avait donc pris la peine de prendre un semblant d’accent suédois pour prononcer ce mot étrange. Ce même accent qui avait surement fait saigner les oreilles de tous les suédois qu’elle avait rencontré pendant les deux mois qu’elle avait passé là-bas. Pour le coup, il n'y avait vraiment de quoi frimer...

Comme elle, Owen se posait ce genre des questions, ces questions que personne ne se pose jamais, des choses auxquelles personne ne pense jamais. Des observations un peu bizarres, des interrogations décalées dont personne n’a de réponse. Elle avait l’impression qu’ensemble, ils pourraient soulever toutes les questions existentielles du Monde en moins d’une heure. Sans réfléchir, elle se lança et demanda à son tour :

Oui, peut-être que chez les animaux il y a des lois contre les humains qui les mangent ? C’est peut-être pour ça que les chiens aboient, les chats miaulent et les rats... couinent ? Pour montrer leur mécontentement contre l’être humain ? Peut-être que la nuit, dans les abattoirs, les vaches et les cochons organisent des réunions pour trouver un moyen de faire régner la justice ? Et les légumes, et si eux aussi avaient des lois contre les humains ? Peut-être qu’un jour les céleris organiseront tous ensemble une grande manifestation dans les rues pour réclamer des lois contre nous, qui sait ? C’est à prendre en compte dans ta campagne tout ça ! Les...

Elle choisit de s’arrêter là, ne prenant pas le risque de s’emporter davantage et d’inventer encore d’autres crises susceptibles de venir ébranler la stabilité judiciaire et sociale de la planète Erret. Suite à la blague de son colocataire sur les Lundigênes, elle eut un sourire en coin et leva un sourcil, en le dévisageant d’un air faussement exaspéré. Elle ne garda cependant pas son sérieux bien longtemps et se mit à rire de bon cœur avec lui. Sa bonne humeur était tellement communicative, c’en était presque inquiétant.

Heureusement, il avait l’air d’apprécier son dessin de banane. A sa plus grande surprise, il ne lui en voulait même pas trop d’avoir ruiné son dessin. Sans le savoir, elle avait même alimenté la créativité de son colocataire, qui trouva un nouveau slogan en moins de temps qu’il n'en faut pour le dire. Avec lui, elle rit, brandit son poing en l’air et se mit à chantonner :

Votez Oooooowmabanana, banana, banana ! Yes we can !

La taille de la banderole était donc convenable et Owmabanana suggéra à Laury de faire des confettis avec la partie du drap qu’il restait. Une idée qui la fit sourire de toutes ses dents : non seulement parce que ce serait effectivement un bon moyen de se débarrasser de toutes preuves d'une éventuelle destruction de drap, mais également parce qu’il s’était encore emporté au point de passer des confettis aux chinois et au riz périmé, et il l'avait encore bien fait rire...

Avant qu’elle n’ait le temps de réfléchir encore à une nouvelle blague en réponse à sa réflexion sur le riz, Owen reprit la parole pour lui demander un service. Il lui fallait un gros marqueur et c’était parfait pour Laury, elle n’était donc pas resté debout tout ce temps pour rien. En bon moussaillon désigné, elle fit un genre de salut militaire avant de s'éclipser une nouvelle fois. Avant de disparaitre complètement dans le couloir, elle déclara :

Cette fois, je parie que t’auras même pas le temps deee.. de réciter l’alphabet une lettre sur deux en commençant par B !

Pour tenir son pari, elle courut et déboula dans le cellier en furie. En chemin, elle aperçut certains habitants installés sur la terrasse en train de petit-déjeuner, ce qui lui rappela que c’était encore le matin, et qu’elle n’avait pas déjeuné... Si elle dut fouiller un peu, elle trouva sans peine tout ce qui lui fallait sur les étagères. Des feutres, des ciseaux et un gros marqueur noir !

Parce qu’elle avait très certainement encore un peu de temps, elle s’empara du paquet de la brioche aux pépites de chocolat pour Owen et s’octroya un détour par la cuisine pour prendre sa brique de lait habituelle. Chargée comme un mulet et de retour dans le dressing, elle s’écria, le sourire toujours jusqu’aux oreilles :

Et voilà J’espère que t’aimes la brioche ! Et que tout ça ne déclenchera pas une guerre mondiale entre les humains et les brioches aux pépites de chocolat…

Elle rit, déposa tout son matériel de bricolage par terre, tendit la brioche aux pépites de chocolat à Owen et reprit place assise par terre à côté de lui face à la banderole. Pendant que ce dernier reproduisait son dessin en beaucoup plus grand, elle but quelques gorgées de lait directement au goulot. Une question la tracassait cependant alors qu’elle regardait ce canevas géant, blanc et en coton qui était étalé devant eux :

Tu vas écrire quoi ? Comme slogan je veux dire ? "Je ne vais pas vous en faire un poème, votez Owen" ou un autre avec Owmabanana ?

Elle eut un petit rire avant de boire une dernière gorgée de lait et de se mettre au travail. Assez rêvassé, elle saisit la paire de ciseaux et un morceau du drap déchiré, dans lequel elle se mit à découper des petits carrés dont elle arrondit ensuite les bords jusqu’à ce qu’ils forment des petits ronds. Au bout de quatre confettis, elle se munit de feutres, plaça les petits cercles de coton dans sa paume et se mit à les colorier tant bien que mal. Et parce que le résultat n’était pas génial, elle grimaça avant de tendre sa main à Owen pour lui montrer et de plaisanter :

Salut, moi c’est Laury, j’ai 21 ans et je sais pas colorier, comment tu vas ?  

Elle rit et se débarrassa des Confettis de la Honte le plus vite possible. Avant de recommencer, elle entreprit de jeter un coup d’œil à l’avancée du dessin du futur président (qui était en fait déjà un Dieu, à la tête d’une planète entière, et qui n'avait en fin de compte pas franchement besoin de faire une campagne présidentielle du tout mais personne ne le sait )...

Vous n'êtes pas responsable de la tête que vous avez mais vous êtes responsable de la gueule que vous faite.
ft. Laury